LE BACCALAURÉAT, CE MARRONNIER ABSURDE …
Dans Le Monde daté du 14/06, dès la première page, on prête à Jean-Michel Blanquer l'intention de "remuscler" l'examen. Le grand principe du discours ministériel sur le baccalauréat, tous ministres de l'éducation confondus, c'est de cultiver la foutaise.
En voilà assez! Il ne faut pas remuscler le baccalauréat, il faut le supprimer d'un trait de plume et passer à une validation cohérente des acquis de la formation initiale Ecole+Collège+Lycée.
Le cursus actuel est incompatible avec le pari de la massification: donner à tous une formation de base solide et de qualité, permettre à chacun de porter au meilleur son excellence.
La solution est, dans ses principes, d'une simplicité biblique.
Tout au long de la scolarité, les enseignements doivent progresser par cumul d'unités de valeur disciplinaires correspondant à des modules courts (vingt à trente heures d'enseignement) sanctionnés, chacun, par le contrôle exigeant des acquis obtenus.
A l'issue du cursus, chaque élève est ainsi doté d'un profil personnel adossé à l'ensemble des unités de valeur obtenues qui le définit parfaitement en termes académiques.
L'entrée dans la vie active ou l'accès aux filières de l'enseignement dit post-bac s'effectue dans la cadre d'une sélection qui s'appuie sur la comparaison des prérequis exigés et des compétences certifiées.
Pour une discipline donnée, le cumul d'unités de valeurs s'effectue au long du cursus en poupée russe et à la vitesse d'acquisition propre de l'élève, indépendamment de son âge. Son tableau de chasse peut être impressionnant en mathématiques et regrettable en français, au-delà d'un plancher transversal d'unités de valeurs accessible à tous sauf cas pathologique et qui vaudra soit (dans l'esprit de la scolarité obligatoire) attestation de fin d'études de niveau I, soit (dans l'esprit du baccalauréat) attestation de fin d'études de niveau II.
Il est clair que la démarche suppose une parcellisation du public scolaire selon les disciplines et par unité de valeur, en groupes d'acquis homogènes. Sachant aussi que les modules conduisant à la délivrance des unités de valeur pourront être recommencés en cas d'échec ad libitum (autant que souhaité).
La suppression complète du baccalauréat est la conséquence évidente de ce qui précède ... et qui est, par ailleurs, trop sélectif dans ses dispositifs de tri pour permettre le développement harmonieux d'un vivre ensemble des classes d'âge et l'installation chez l'élève de tout ce qui n'est pas la compétence académique sélective.
Il n'y a donc là qu'une partie, disons la moitié, du temps scolaire.
L'autre moitié sera consacrée, en regroupant les élèves sur des principes actuellement en cours, à faire vivre ensemble des groupes homogènes en âge, aux acquis diversifiés, autour d'activités de réflexion et de mise en commun de l'éventail des talents et des compétences du groupe, insérant progressivement l'élève dans une vie sociale ouverte à la discussion, à l'échange, au dialogue, à la recherche en commun, à l'examen critique des problèmes du monde grâce aux outils du raisonnement, de la raison, de la tolérance, de l'enrichissement culturel de chacun par tous.
Mettre en œuvre les principes énoncés suppose une remise en question complète du fonctionnement des établissements, de leur architecture, de leur gouvernance, des missions, des services et de la formation des maîtres , etc.
Sans parler de la notion de programme, de l'atomisation des champs disciplinaires en unités de valeur, de la définition des activités de la moitié scolaire du vivre et penser ensemble etc.
Un immense chantier, en somme. Mais à quoi sert une ambition politique ouverte sur l'avenir sinon à cela: changer le monde par l'Ecole?