Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
AutreMonde
8 novembre 2023

SAMUEL PATY, DOMINIQUE BERNARD: L'EXCLUSION N'EST PAS UNE SOLUTION

Le texte qui suit (désormais obsolète) est une proposition pour la page Débats du Monde, examinée puis finalement non retenue  par le journal.

Elle date de la fin de la première semaine des congés de Toussaint.

Il y a dans la seconde moitié recouvrement partiel avec mon post précédent.

Récemment (une dizaine de jours) sur le site du Ministère de l'Education Nationale, à propos de perturbations à l'hommage à Dominique Bernard (Samuel Paty, il y a trois ans, en avait eu son lot) ceci:

Le ministre a communiqué hier un premier bilan, avec 179 contestations et perturbations. Il a annoncé que tous les élèves concernés faisaient l’objet d’une saisine du procureur de la République, d’une procédure disciplinaire, et que pour plusieurs dizaines d’entre eux, il demandait aux chefs d’établissement une exclusion immédiate sans attendre le conseil de discipline.

En intégrant des signalements remontés plus tardivement, et le concours des services du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, un nouveau bilan peut être effectué. Ainsi, en date du mercredi 18 octobre 2023 à 12h, au moins 357 perturbations et contestations des temps d’hommage ont été signalés. Conformément à l’instruction de transparence absolue donnée par Gabriel Attal, de nouveaux signalements continuent à être faits.

Un nouveau bilan sera donc communiqué ultérieurement. Par ailleurs, Gabriel Attal réaffirme sa règle en la matière : tous ces signalements font l’objet d’une saisine systématique du procureur de la République et d’une procédure disciplinaire pour les élèves concernés.

Pour les cas les plus graves qui s’apparentent à des menaces ou à de l’apologie du terrorisme, une exclusion immédiate des élèves est demandée aux chefs d’établissement, sans délai. Gabriel Attal le réaffirme : la page du "pas de vague" est définitivement tournée.

Mise à jour : octobre 2023

On trouve là un exemple, hélas parmi d'autres, de l'inadaptation de la réponse au problème posé. L'exclusion de l'établissement n'est ici que l'occultation de la difficulté par occultation de son responsable. Elle constitue un geste inutile.

Le ressort essentiel de la démarche éducative consiste à guider l'élève vers un comportement rationnel, raisonnable et réfléchi, par la prise de conscience d'une situation à travers l'explicitation verbalisée, dialoguée, soutenue et aidée, de la vision qu'il en a et très souvent qu'il n'en a pas. Il faut d'une certaine façon, aider le contestataire à contester, c'est à dire à inscrire sa protestation dans une rationalité dont il prenne pleinement conscience, adossée à des principes argumentaires, appuyée sur une connaissance des faits, une compréhension du contexte, verbalisée au sein d'un discours logique.

En milieu scolaire, dans ce temps précieux de la formation initiale, face aux incidents relevant du refus ou de la mise en cause des attitudes demandées, seul le dialogue de classe, devant et avec ses pairs, intégré dans l'échange attentif et ouvert de modérateurs-interlocuteurs adultes, est la voie lente mais sûre d'un ressaisissement espéré. Le temps est ici la dimension essentielle, nécessaire.

Et ce temps, notre système éducatif ne le prévoit pas. La course en avant à travers les programmes pousse sous le tapis tout ce qui entrave son avancée et crée par là même les conditions de ses échecs.

Sur un cas spécifique comme celui évoqué, c'est bien au sein des classes où sévissent les trublions que doit être abordé collectivement avec eux le problème.  C'est bien en affrontant publiquement (c'est-à-dire, ici, dans la classe) avec eux, devant leurs camarades et avec la participation recherchée de ceux-ci, les questions soulevées par leur attitude, en en co-analysant le contexte et le sens, en visant à en rendre compréhensibles l'expression et explicités, assumés, les ressorts, que l'on pourra tenter la responsabilisation, l'éveil à la logique, la prise de conscience des biais et des aberrations. Il ne faut pas désespérer des imbéciles et faire obstinément le pari de l'intelligence. Mais c'est difficile et long.

Cette mise à plat et en perspective des dysfonctionnements scolaires au sein des groupes-classes, aigus en la circonstance mais en réalité et sur tous les sujets, latents, elle devrait ici imposer, à la rentrée du 6 Novembre, la banalisation hebdomadaire jusqu'aux congés de Noël des deux premières heures (voire de la totalité) de la matinée du lundi. On peut imaginer un dispositif requérant la présence effective de tous les personnels enseignants afin de garantir un minimum de deux interlocuteurs adultes par classe.

Dans le cas précis des élèves repérés, c'est autour de leur attitude que devrait s'engager immédiatement, et dans l'esprit que j'ai indiqué, le débat. Il faut leur faire comprendre qu'on veut les comprendre, dans leur intérêt personnel, dans l'intérêt collectif, et à travers l'explicitation de leur comportement, qu'on veut s'enrichir collectivement de l'analyse partagée des problèmes d'ensemble posés à tous par la situation.

Ce principe d'échange hebdomadaire pourrait être avec bénéfice, au-delà,  agrégé au fonctionnement standard des établissements où l'échange serait à centrer sur l'actualité du monde comme il va, proche ou lointain, à partir des événements de la semaine précédente et en l'adossant d'abord aux interrogations des élèves. L'établissement est une communauté éducative qui, à travers les élèves, s'élargit aux parents, et c'est dans un tel dialogue régulier que peuvent et s'installer la prise de conscience collective des problèmes et se cerner les blocages individuels à traiter. On parle à tout propos de libérer la parole.  À l'école aussi une part, une grande part des problèmes est là, et il ne faut pas en avoir peur. 

Ce qui est sous-jacent à cette proposition, d'ailleurs, c'est une relecture de l'organisation scolaire où le temps gagnerait à être strictement dichotomisé, les matinées consacrées à des activités de socialisation par l'échange et l'échange des compétences dans des groupes-classes hétérogènes, confrontés sous l'égide d'un binôme d'enseignants à la mise en commun des connaissances dans la perspective d'une compréhension du monde assise sur des perspectives historiques et scientifiques, et les après-midi tournés vers l'excellence académique dans un jeu d'options distribuées à des groupes homogènes en niveau, ceci permettant à chacun d'aller le plus loin possible sur des voies choisies, et à son rythme. On peut rêver.

Publicité
Publicité
Commentaires
C
Effectivement.Mille excuses. Elle n'était pas ouverte au public. Elle est maintenant épinglée en premier.
Répondre
C
Refus. Message dit de sécurité. Vous pouvez, si vous le souhaitez, trouver copie de cet essai sur ma page FB. (Guy Cirla) <br /> <br /> Merci de vos éventuels retours critiques.<br /> <br /> Cordialement.<br /> <br /> Guy Cirla
Répondre
S
Si vous avez un fichier ...
Répondre
C
Puis-je vous transmettre un essai de Reconstruction de l'École Publique Laïque où vous pourrez retrouver votre "patte" ?
Répondre
AutreMonde
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité