Nous avons pu nous procurer le texte du projet de voeux présidentiels initialement rédigé par le Président .
Malheureusement, ce projet a été retoqué par la Première dame et remplacé par la soupe usuelle préparée par une plume officielle anonyme.
Nous présentons ci-dessous le texte rejeté.
Mes chers compatriotes,
D'autres se chargeront de vous faire des comptes-rendus circonstanciés de l'année 2023 et deuxième de mon second quinquennat. Je n'y serai pas toujours à mon avantage, c'est la loi du genre. Ils vous diront aussi, avec des talents divers, ce que la suite devrait être. Je vous engage à vous informer de tous les points de vue à travers la diversité croisée de nos médias et à réfléchir. Soyez simplement assuré que de mon côté, je ferai, en appui sur mes équipes gouvernementales, de mon mieux.
Toutefois, à la place qui est la mienne, je voudrais à l'orée de 2024, attirer votre attention sur l'horizon sans doute le plus important des tâches à venir, celui de l'éducation. Nous ne l'avons pas assez, et nous l'avons mal cerné.
Tout commence avec la formation initiale qu'on peut assez largement comprendre comme celle délivrée dans les écoles, les collèges et les lycées. Chacun peut concevoir que son objectif principal est de donner à la jeunesse les outils nécessaires pour comprendre le monde et pour s'y insérer en œuvrant tant dans son intérêt personnel que dans l'intérêt général à la construction d'une société meilleure.
Dans quelques jours, le système éducatif va se remettre en marche. Et le matin du lundi 8 janvier, en se dirigeant vers son établissement, chaque élève, chaque professeur, chaque cadre, chaque personnel de service de l'éducation nationale devra se poser cette question : la façon dont je comprends, dont j'exécute ma tâche d'élève, de professeur, de cadre, de personnel de service vise-t-elle cet objectif, répond-elle à cet objectif? Et comment pourrais-je mieux le servir pour l'atteindre?
Mes chers compatriotes, j'ai l'étrange devoir de vous le dire, nous ne résoudrons aucun des problèmes qui nous préoccupent sans un approfondissement de nos vertus. Etrange discours, étrange énoncé, je le conçois, mais incontournable. Et cet approfondissement commence à l'Ecole.
Le "Qu'enseigner?" et le "Comment enseigner?" doivent être constamment questionnés. Dans tous les établissements scolaires, lundi 8 janvier prochain, ces interrogations doivent être présentes à l'esprit de tous les acteurs. Tous nos résultats actuels montrent assez que nous y répondons aujourd'hui très mal.
2024 doit être l'année zéro d'un renouvellement.
Je vais vous indiquer quelques-unes des pistes sur lesquelles j'ai décidé de nous engager.
Ce projet éducatif sera prioritaire au long du temps de mandat qui me reste et je compte que les réussites mesurables qui accompagneront ses premières réalisations imposeront de le poursuivre.
Nous allons redéfinir un premier bagage de connaissances et de pratiques que tout citoyen devra avoir acquis en quittant la formation initiale. Au-delà de ce bagage, c'est un système optionnel qui permettra aux excellences individuelles de s'exprimer. Les acquisitions se feront tout au long de la scolarité par unités de valeur cumulées, attribuées via un contrôle continu rigoureux qui permettra la suppression de l'encombrant, inefficace et coûteux système de nos examens.
Nous allons ainsi poser le principe, pour chacun, d'une formation articulée autour d'un double cheminement sur deux mi-temps parallèles. Un mi-temps d'insertion civique et citoyenne, un mi-temps d'excellence individuelle:
Dans le cadre du premier, on fera vivre des classes de vingt-cinq élèves du même âge, confiées à un binôme d'enseignants qui les conduira, en officiant ensemble, sur les voies d'une mise en commun constructive des acquis de chacun, au long d'activités d'ouverture au monde et d'analyse et de compréhension de ses mécanismes, à des fins d'insertion sociale et citoyenne vertueuse et optimale.
L'Education physique et sportive, volet important, sera partie intégrante de ce mi-temps.
Dans le cadre du second on définira, unité de valeur par unité de valeur, des groupes allégés de quinze élèves, groupes homogènes (sans critère d'âge) en termes d'acquis dans la discipline, attachés à acquérir sous la direction d'un professeur spécialisé la validation de l'unité enseignée.
Simple à énoncer, un tel système est d'une grande complexité opérationnelle et tout est à repenser:
- les contenus et la pédagogie, sens et buts
- le recrutement, la formation et le service des enseignants
- la configuration et la gestion des locaux
Il y faudra et nous les y mettrons, des moyens tout à fait considérables.
Des directives claires vont être adressées aux directeurs d'école, principaux de collège et proviseurs de lycée sous huitaine pour les aider à organiser en continu avec les équipes éducatives, durant les deux trimestres restants de l'année scolaire, une réflexion locale et collective sur les exigences et la faisabilité d'un projet dont les services compétents vont constamment préciser les contours, progressivement affinés grâce à la navette dialoguée avec chaque établissement qui sera mise en place à partir de la mi-janvier.
Mes chers compatriotes, le discours que je vous tiens - et on ne manquera pas de commencer par là les reproches qui lui seront adressés - peut sembler davantage celui d'un ministre de l'Education nationale que d'un Président de la République. Et pourtant, le dossier éducatif, la formation initiale, c'est le nœud gordien qui interdit au pays de reprendre son envol. Tout découle de là. Sans des citoyens compétents et éclairés, rien ne progressera tant tous nos maux relèvent des petitesses, des mesquineries, des incompétences, des insuffisances culturelles et du manque résolu de vertu de trop d'entre nous, étroitement repliés sur des ambitions égoïstes, sur l'indifférence aux autres, esclaves du mercantilisme, du consumérisme et de l'argent, aveugles aux douleurs du monde, oublieux de l'essentiel.
Seul, le ressaisissement de l'avenir par l'éducation peut ouvrir un espoir, seul. Tout le reste n'est que discours. Sur tous les autres dossiers, on peut gérer les affaires courantes. Rien n'ira mieux, mais rien de ce sur quoi nous croyons pouvoir agir ne s'effondrera. Sur l'éducation, nous n'avons pas ce choix. Ne pas agir au plus haut niveau, qui est celui où vous m'avez placé, c'est laisser aller le pays à sa perte. La France doit retrouver toute sa noblesse par les enfants qu'elle construit. Et c'est au fond ma seule vraie mission que d'y travailler et d'y réussir.
Vive la R…, vive la F…