Le Monde est Mathématique …
Remarques sur le tome 1 de la collection : « Le Nombre d’Or ».
[I] Quelques idées sur les « Nombres de métal » (niveau lycée)
Cédric VILLANI – Médaillé Fields 2010
De fait, il s’agit au départ du travail d’une équipe espagnole, repris et « francisé » par l’équipe de l’IHP (Institut Henri Poincaré – Paris) dont Cédric Villani est le directeur. J’ai moi-même, étudiant, fréquenté l’intitut en 1966, du temps qu’y officiaient Paul Dubreuil, excellent pédagogue et mathématicien que je supposais, peut-être à tort, modeste, et Charles Pisot, que je prenais pour un excellent mathématicien et qui était à l’évidence un assez regrettable pédagogue. J’y ai fait un peu d’Algèbre et, théoriquement, côtoyé des éléments de Théorie des nombres à un niveau qui s’intitulait « Etudes approfondies » et ne m’a laissé que des traces plus que superficielles !
Ce premier volume ici d’une collection de 40 livres que le quotidien Le Monde met en route est consacré à :
Phi=(1+Rac(5))/2 … de valeur approchée 1,618033989 (au milliardième près) (Rac= Racine Carrée)
… communément désigné comme "Nombre d'Or" et non moins usuellement présenté comme réalisant l’optimum esthétique du rapport longueur/largeur d’un rectangle - avec souvent référence à la façade du Parthénon, etc.
On est là dans le cadre d’une vulgarisation qui se veut à la fois élégante, complète, et interdisciplinaire. La gageure est difficile et relativement peu – a priori – dans mes goûts, tant, faute de donner des argumentations totalement abouties, l’exercice peut laisser un sentiment d’incertitude et de frustration.
Il y a dans ce travail deux parties assez nettement distinctes. D’abord trois chapitres de présentation qui ont un caratère plutôt technique à partir de la « Suite de Fibonacci », et ensuite deux chapitres à vocation plus ouverte sur le nombre d’or « Dans les arts » et « Dans la nature ». Cette seconde partie m’a moins convaincu tant, en dépit des efforts des rédacteurs, l’arbitraire m’a paru pouvoir y jouer un rôle, éventuellement subliminal.
Sur la première partie en ses trois chapitres, le professeur de lycée peut trouver matière à exercer son appétit pédagogique en prélevant quelques bons thèmes de travail en classe, avec le plaisir de faire compléter à ses élèves les trous « calculatoires » que n’a pas comblés le souci de vulgarisation. Le plaisir aussi de rectifier quelques (rares) coquilles.
Il est déjà amusant pour des élèves de « sentir » que Phi apparaît comme écriture limite de :
Rac(1+Rac(1+Rac (1+Rac(1+Rac(1+Rac(1+….))))))
en faisant percevoir l’affaire à l’aide d’une calculatrice ; l’initialisation B <== 0 (B reçoit la valeur 0) suivie de l’itération (une vingtaine de fois) B<== Rac(1+B) (B reçoit racine carrée de 1+B) conduisant à la stabilisation d’affichage : 1,618033989 porte cette écriture potentiellement illimitée vers la relation
Phi = Rac(1+Rac(1+Rac (1+Rac(1+Rac(1+Rac(1+….)))))) si l’on s’appuie sur l’a priori de la valeur annoncée de Phi, mais aussi, vers l’écriture : Phi=Rac(1+Phi), soit Phi2 =1+Phi avec Phi>0. La résolution de l'équation du second degré est immédiate et donne bien: Phi=(1+Rac(5))/2
De même pour l’hypothèse d’écriture illimitée (fraction continue simple):
Phi= 1+1/(1+1/(1+1/(1+1/(1+1/(…))))), toujours avec une approche « calculatrice » ; l’initialisation B<==1 (B reçoit la valeur 1) suivie de l’itération (une grosse vingtaine de fois) B<==1+1/B (B reçoit 1 + 1/B) conduisant à la stabilisation d’affichage : 1,618033989
Avec cette fois en contrepoint l’écriture tentante : Phi=1+1/Phi, soit de nouveau, Phi2 =1+Phi avec Phi>0. Et la même conclusion.
Les micro-algorithmes indiqués sont de programmation très simple et on peut jouer sur le second par exemple en y introduisant un paramètre flottant (égal à 1 dans le cas de Phi) :
? ==> A ; 1==> B ; [ étiquette 1] ; A+1/B==> B ; [afficher B] ; [retourner à l’étiquette 1]
… pour constater que l’affichage se stabilise à :
2,414213562 quand A=2 (au bout d’une douzaine d’itérations)
3,302775638 quand A=3 (au terme d’une grosse dizaine d’itérations)
etc.
Et on peut réfléchir en termes d’écriture illimitée associée :
Phi2=2+1/(2+1/(2+1/(2+1/(2+1/(2+…))))) ==> Phi2 = 2 + 1/Phi2
Phi3=3+1/(3+1/(3+1/(3+1/(3+1/(3+…))))) ==> Phi3 = 3 + 1/ Phi3
avec les équations du second degré à la clé (dont seule nous intéressent les racines positives) :
Phi22 = 2Phi2 + 1 soit Phi22 - 2Phi2 - 1 = 0 d’où : Phi2 = 1+Rac(2)
Phi32 = 3Phi3 + 1 soit Phi32 - 3Phi3 - 1 = 0 d’où : Phi3 = (3+Rac(13))/2
etc .
Phi2 est dit Nombre d’argent, Phi3 est dit Nombre de bronze et en gardant le paramétrage en A entier, on obtient une suite dénombrable de Nombres de métal PhiA, solutions positives de l’équation générique du second degré:
PhiA2-APhiA-1=0 déduite de la relation d’écriture : PhiA=A+1/ PhiA.
Et donc avec, en résolvant : PhiA = (A+Rac(A2+4))/2
On peut définir un peu plus largement les Nombres de métal PhiA,C comme solutions positives de l’équation du second degré paramétrée en nombres entiers :
X2-AX-C=0.
Ce qui donne l’idée de les lire sous la forme : PhiA,C = A + C/ PhiA,C et donc, dans le prolongement de ce qui a été rencontré pour Phi2 et Phi3, comme résultant de l’écriture limite (en fraction continue) :
PhiA,C = A+C/(A+C/(A+C/(A+C/(A+C/(A+ …)))))
Les PhiA déjà introduits (Phi2 et Phi3) sont donc des PhiA,1.
Par résolution de « leur » équation du second degré : PhiA,C = (A+Rac(A2+4C))/2
On avait par ailleurs déjà remarqué que le Nombre d’or était aussi susceptible d’être atteint par l’écriture :
Phi = Rac(1+Rac(1+Rac (1+Rac(1+Rac(1+Rac(1+….))))))
Quid alors des écritures similaires, avec C paramètre entier ?
X(?) = Rac(C+Rac(C+Rac (C+Rac(C+Rac(C+Rac(C+….))))))
Si elles ont un sens, elles nous renvoient naturellement à l’équation générique :
X=Rac(C+X), soit, à solution positive : X2-X-C=0, ce qui débouche alors sur :
Rac(C+Rac(C+Rac (C+Rac(C+Rac(C+Rac(C+….)))))) = Phi1,C
et sur :
Rac(C+Rac(C+Rac (C+Rac(C+Rac(C+….)))))=1+C/(1+C/(1+C/(1+C/(1+…))))
On peut achever le petit tour d’horizon en programmant l’itération indiquée des radicaux :
? ==> C ; C ==>B ; [ étiquette 1] ; RacB==>A ; [afficher A] ; C+ A==>B; [retourner à l’étiquette 1]
Pour C=2, on obtient l’affichage attendu, 2, en 17 itérations. Ainsi :
2=Rac(2+Rac(2+Rac (2+Rac(2+Rac(2+Rac(2+….))))))
Pour C=3, on obtient la stabilité d’affichage à 2,302775638 en 16 itérations, pour l’attendu : (1+Rac(13))/2
Si l'on veut, par extension, écrire sous forme de radicaux tous les Nombres de métal, on repart de leur équation générique (X2-AX-C=0) pour la lire (ils sont positifs) X=Rac(C+AX), ce qui nous renvoie à la forme hypothétique:
X(?) = Rac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+….))))))
L’assimilation de l’affaire à une construction récurrente de nième terme Xn avec Xn=Rac(C+AXn-1) permet un raisonnement « de lycée » assez simple concluant à la convergence (on travaille dans les réels positifs) de la suite des Xn vers la solution positive L de l’équation générique précédente.
Les racines de celles-ci sont en effet, par l’examen de leur produit, égal à –C, de signes opposés. Le terme (positif) X0 de départ est donc soit compris entre 0 et L, la racine positive, et c’est le cas n°1, soit plus grand que L (cas n°2) . Pour X0=L, tous les Xn sont égaux à L.
Tous les termes étant positifs, la différence Xn-Xn-1 est du signe de Xn2-Xn-12 donc, par l’équation générique, du signe de -( Xn-12-AXn-1-C), c’est-à-dire positive dans le cas n°1 et négative dans le cas n°2.
Par ailleurs, si on compare Xn et L, on voit que la différence Xn-L est du signe de Xn2-L2, donc du signe de
(AXn-1–C) - (AL-C), soit A(Xn-1-L).
Donc, Xn et Xn-1 sont toujours « du même côté » de L.
Dans le cas n°1, la suite des Xn est donc croissante et majorée (par L); dans le cas n°2, elle est décroissante et minorée (par L); dans les deux cas, il y a bien convergence.
Finalement, on a bien :
PhiA,C =Rac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+….))))))
et du coup :
Rac(C+ARac(C+ARac(C+ARac(C+….))))=A+C/(A+C/(A+C/(A+C/(A+…))))
A SUIVRE ….