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AutreMonde
7 septembre 2007

Un nom de ville .....

Hasard d’une pile de revues, salle d’attente d’un médecin, m’est tombé sous la main un “vieux” numéro du Point (du 7 juin dernier) avec ce titre définitif: “ Éducation - Enquête sur un désastre national”. C’était l’autre lundi, en convergence avec la parution du rapport du HCE sur le primaire; ma foi, j’ai lu ... L’enquête croise en fait les opinions de l’universitaire Jacques Marseille et les investigations (?) de Marie-Sandrine Sgherri, que je suppose journaliste de l’hebdomadaire. Ça se parcourt agréablement, sans découverte notable; en ce moment, tout le monde y va de son cri d’alarme et on retrouve les mêmes données partout ... Non, ce qui est (pourrait être) intéressant, après le constat, c’est l’éventualité d’une proposition de réforme un peu structurée. Que le bac soit - en l’état - une ruineuse fumisterie n’étonnera personne (j’entends ce matin sur France-Inter l’ex président de la Sorbonne - Jean Robert Pitte (prénom non garanti) - dire deux mots du bouquin qu’il sort sur “l’arnaque du baccalauréat”), que l’agrégation d’anglais sélectionne des individualités probablement brillantes mais très imparfaitement anglophones sera compris comme une petite affirmation provocatrice sans doute non dépourvue de fond, que le corporatisme enseignant et son arc-boutement sur tout ce qui se perçoit et se vit comme un avantage acquis ruine par avance toute audace réformiste sera accepté comme une évidence, que les ministres de l’éducation successifs ne fassent qu’illustrer dans des registres divers une incapacité accomplie à gérer les responsabilités qu’on leur confie ne renverra qu’à une routine, enfin que Philippe Meirieu, héraut des “pédagogues”, porte la moustache plus grise et moins fournie que l’arrogante pilosité qui orne la lèvre supérieure de Jean-Paul Brighelli (La fabrique du crétin), d’Artagnan des “républicains”, ouvrira certes des horizons sur les points communs à ces écoles de pensée antagonistes mais fournira peu de pistes quant aux décisions de réforme à prendre . Non, lesdites décisions, c’est Jacques Marseille qui, in fine, se charge de nous les annoncer, au moins dans leurs principales lignes de force: “Suppression de la carte scolaire / Réduction du nombre d’enseignants pour mieux les rémunérer au mérite (Pourquoi ne pas doubler le salaire de ceux qui se déclarent volontaires pour aller enseigner dans les zones sensibles?) / Réduction forte des options au lycée / Investissement massif dans les zones sensibles avec concentration des aides sur les enfants de milieux socialement défavorisés / Augmentation massive des droits d’inscription à l’université et véritables bourses pour ceux qui en ont vraiment besoin / Autonomie des établissements et émulation pour inciter chacun d’eux à améliorer ses performances / Orientation véritable mieux connectée au monde du travail / Remplacement d’un seul enseignant sur deux dans le cadre des départs à la retraite d’ici 2013”. À ces conditions, qu’il pense être “des mesures empreintes de bon sens”, Jacques Marseille n’estime pas la réforme impossible. Qu’en dire? La suppression de la carte scolaire est un contresens. Le principe même de rémunération au mérite est contre productif. Le doublement des rémunérations en zones sensibles est une suggestion absurde et invraisemblable, que signe le projet d’investissement massif dans lesdites zones, alors que la première mesure à prendre, qui n’est paradoxale que dans une logique ghettoïsée du système d’éducation, devrait être de supprimer les ZEP! La vraie réponse est dans la révision des structures éducatives, la perspective étant de concilier un schéma national unique et - grâce à l’autonomie des établissements et à l’émergence de véritables politiques pédagogiques locales - des pratiques diversifiées, adaptées au “terrain”. C’est dans cette logique que la notion de ZEP doit s’effacer au profit du concept général de ZPC (Zones Pédagogiquement Cohérentes), éventuellement construites par possible révision de la carte scolaire, mais surtout inscrites dans une “politique globale de réhabilitation des quartiers” - et Xavier Darcos, qui l’a dit, a raison - et adossées à la mise en œuvre de réseaux d’établissement faisant jouer à plein la complémentarité/compatibilité de leurs potentiels et de leurs approches. Jacques Marseille ne met pas assez en avant la question préalable de la formation des maîtres, de la nécessité des équipes et de l’éclosion d’une autre mentalité enseignante, collectivement responsable de la réussite de “son” établissement, non dans une émulation de concurrence vaine mais dans la quête d’une excellence locale “adaptée”, et partant, il engage mal le processus. Il annonce des pistes mais il ne fournit pas une philosophie de départ. Or il est primordial de prendre conscience de ce qu’il faut à la fois socialiser en groupes hétérogènes les classes d’âge qui montent et offrir, en recherche d’excellence personnelle, des parcours à la carte aux individualités, à former en groupes homogènes sur critères de niveau et d’acquis, avec des progressions différenciées à champs disciplinaires séparés. Deux mi-temps de formation, deux types d’enseignement, dans une même école pour tous. Des objectifs nationaux ouverts; des maîtres recrutés et formés pour un “autre” métier, où se côtoieront des généralistes polyvalents (la bivalence est un leurre) et des spécialistes des disciplines; des établissements autonomes où des équipes éducatives responsables géreront au mieux l’adéquation à définir entre les moyens alloués - dont le potentiel qu’elles représentent - et les exigences du public scolaire à accueillir; une autre conception de l’encadrement, depuis l’impulsion-guidage-soutien des corps (ex)d’inspection à repenser jusqu’à l’élection en interne et sur projet-programme des chefs d’établissement pour des mandats à durée déterminée ... voilà des esquisses dont on ne sent pas assez les débuts d’ébauche dans un discours qui, à vouloir favoriser les milieux défavorisés, se marque “à droite”, faute d’envisager qu’il cesse d’y en avoir, et où finalement, l’individu “méritant” doit être “récompensé”, élève ou professeur, ce qui est dans le fond la négation de cet idéal à transmettre des objectifs de formation: s’enrichir de ce qu’on apprend, de ce qu’on recherche, de ce qu’on réalise et, en sortant meilleur, s’en trouver amplement gratifié. Mais, j’en conviens, affirmer que comprendre le monde par la réflexion est plus intéressant que le posséder par l’argent n’est sans doute pas aujourd’hui un discours très “porteur”. Quoi qu’il en soit, le titre du Monde du 29/8, page 9, situe bien le problème: “En dix ans, aucune réforme n’a eu d’effet notable sur l’échec scolaire” ... De ministre en ministre et de Charybde en Scylla, des mesures simples et pratiques d’un Chevénement (il y a plus de vingt ans, en fait !) aux mesures de bon sens de Jacques Marseille aujourd’hui, on reste en décalage par rapport aux nécessités premières du dossier: la refonte de la scolarité obligatoire dans la double direction de formation effleurée ci-dessus - socialiser les classes d’âge / ouvrir à leur excellence les individus - , et le naufrage continue, ponctué de rapports officiels en guise de requiems....
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