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AutreMonde
23 septembre 2006

Sur une proposition scandaleuse

La page Débats du Monde et du samedi 23 / 09 a cru bon de retenir pour la verser à la discussion une proposition éducative (?) intitulée “Le collège sur concours”. Ce texte, sur le fond, est parfaitement fascisant, comme est fascinant le glissement critérié (filtrage et choix?) par lequel, insidieusement, il se trouve doté de la légitimité de notre “grand journal du soir”! Tout dans ce papier, sous couvert de lucidité et de rejet des hypocrisies, s’appuie sur l’idéologie classificatrice de la victoire du plus fort. Le malheureux Albert Jacquard, s’il l’a eu entre les mains, a dû friser la crise cardiaque. Comment peut-on torcher de telles insanités?: “...le jeu social est concurrentiel, à l’école comme ailleurs (...) de sorte qu’il n’est pas surprenant, ni scandaleux, en termes de morale personnelle, que les familles qui le peuvent contournent la carte scolaire, etc.”. Et bien justement, c’est scandaleux! “En termes de morale personnelle”... Ainsi il y aurait une morale “générale”, pleine de théorie et de bons sentiments, je suppose, faite pour les effets de manche, les discours lénifiants et in fine, les gogos, et une morale “personnelle”, âpre au gain, moi d’abord et qu’importe si je te piétine pourvu que je passe, la vraie morale, la seule efficace, qui remplace le “Connais-toi toi-même” de la sagesse grecque par un “Démerde-toi toi-même” mieux venu en ces temps rendus à la “struggle for life” des premiers hominidés. La démarche intellectuelle de l’auteur nie totalement la possibilité de modifier les conditions éducatives et, prenant acte de ce qu’elles sont largement déplorables tout au long du cursus de la formation obligatoire, sans chercher à leur porter remède (programmes, structure des établissements, gouvernance des susdits (problème des chefs d’établissement), formation des maîtres, inadaptation des corps de contrôle (inspections), obsolescence des approches pédagogiques, etc.), affirme que puisqu’il en est ainsi, la seule voie de recours est la loi du plus fort. Que le meilleur gagne, dans une société à conforter dans son hyper-hiérarchisation, et que crève “l’angélisme égalitaire”, cet insupportable boulet attaché au pied de la “méritocratie républicaine”. Philippe Genestier, c’est ainsi qu’il se nomme, enfile les perles d’un bêtisier élitiste et borné qui refuse de comprendre que l’intelligence des situations pourrait rester la grande force d’équipes pédagogiques compétentes, formées à l’initiative, pleinement autonomes à l’intérieur d’un cadre de cohérence fermement dessiné mais léger, responsables, complètement responsables des avenirs scolaires, là, secteur par secteur, dans la diversité et l’hétérogénéité des populations scolaires qui leur échouent, au sein d’un réseau de formation certes entièrement à revoir, mais fidèle définitivement à ce qui fait l’enseignant: sa foi en l’intelligence, en la tolérance, en l’ouverture, en l’homme. Le système éducatif est totalement à reconvertir? Vrai. Mais il ne s’agit pas “qu’il existe des établissements d’excellence où se concentrent les meilleurs élèves”, il s’agit qu’un remodelage des conditions d’enseignement ouvre au meilleur de chacun la possibilité de s’épanouir dans l’espoir d’un partage équilibré de l’immense chance de vivre.
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