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AutreMonde
17 mai 2010

Actualité de la réflexion éducative

Après le récent rapport de l’Institut Montaigne sur l’école primaire, c’est la Cour des Comptes qui publie le résultat de trois ans de travail sur le thème : L ‘éducation nationale face à l’objectif de la réussite de tous les élèves.

On trouve l’intégralité de ce rapport sur le site de la Cour http://www.ccomptes.fr/fr/CC/Accueil.html

Le quotidien Le Monde, sous la plume de Marc Dupuis, en a proposé une analyse dans son numéro daté du Jeudi 13 Mai 2010.

L’école, par ailleurs hélas abonnée, via quelques épisodes au sens propre saignants dont l’espace médiatique est toujours friand, à la rubrique des faits divers, est ainsi à l’ordre du jour des réflexions de fond. Ce n’est pas une nouveauté, les rapports la concernant fleurissent à intervalles réguliers, les consultations nationales se suivent et toujours, ses inadaptations demeurent. La dénonciation de ses maux relève du marronnier journalistique et les ministères successifs jurent que justement, ils sont en train de s’y mettre, que les meures salvatrices sont à l’étude sinon en cours, qu’on a mal interprété les chiffres et que les améliorations sont pour demain matin.

L’épisode actuel n’échappe pas à la règle. En réaction au rapport très informé, très détaillé, et essentiellement critique – la seule table des matières est édifiante – de la Cour des Comptes, la réponse du Ministère conteste à peu près tout en affirmant ou qu’on n’a pas compris, ou que ce qu’on préconise est déjà en marche, avec cette fantastique nouvelle de nature à réchauffer les cœurs dans les chaumières pédagogiques : L’inspection générale travaille !

Effectivement, que demander de plus ?

Tout ça est assez navrant.

Coûteux et inefficace, totalement empêtré dans ses complexités inextricables, le système éducatif ne parvient à répondre de façon satisfaisante à aucun des objectifs qui lui sont fixés par la loi. La dénonciation de ses insuffisances est un jeu de massacre sans difficultés majeures . Mais d’études en analyses et de préconisations en recommandations, tout se noie dans les sables de l’inertie politico-administrative et se heurte au conservatisme d’une structure qui se nourrit de son gigantisme apeuré pour ne toucher à rien. Ça marche mal, ça marche même très mal, tout le monde en convient, mais voilà, ça marche, et l’on est effrayé par l’effondrement potentiel, si l’on s’avisait de s’attaquer un peu sérieusement à l’affaire, de ce qui pourrait se révéler dans la poussée soudain de ses inadaptations débridée par la perspective d’une vraie réforme, un château de cartes.

Un appel de l’Unicef occupe actuellement une partie de l’espace publicitaire :

Slogan

Construisons l’école qui reconstruira ces enfants – Donnez 10€ /mois pour Haïti, dit cet appel. La formule serait à reprendre et la photographie pourrait être, sans insulter la misère de cette région, détournée de son sens propre pour s’appliquer métaphoriquement à notre système éducatif, en ruines. Avec éventuellement ce retournement : Reconstruisons l’école qui construira nos enfants. Sans doute, quelques secteurs fonctionnent encore, on trouve toujours que Cassandre exagère, mais outre que la suite lui a, en son temps, donné raison, dans le quotidien des zones difficiles, dans trop de Collèges, dans trop de L.E.P., quels effondrements pédagogiques. On n’enseigne pas, on endigue des débordements. On n’éduque pas la jeunesse, on la canalise.

Que penser, en attendant, des treize recommandations finales de la Cour des Comptes au menu du jour ?

Quatre portent sur la gestion du système. Elles convergent vers une refonte des systèmes d’information du ministère afin de disposer d’évaluations précises et modulées de la diversité des situations scolaires permettant d’adapter les attributions de moyens à la réalité locale des besoins. Ce sont des pétitions de principe, sans proposition programmatique.

Trois se préoccupent d’adapter l’organisation scolaire aux besoins des élèves. Deux visent à redéfinir dans ses contours, ses contenus et le public spécifiquement visé le concept d’accompagnement scolaire. La troisième se préoccupe de réorganiser le temps scolaire dans le premier degré. Dans les trois cas, rien d’opérationnel. Des vœux.

Deux parlent d’accorder le service des enseignants du second degré à la diversité de leurs missions. L’une des deux couvre la demande d’une formation des enseignants à l’accompagnement personnalisé des élèves (elle ne va pas au delà de son intitulé), mais l’autre formule une requête qui entrouvre très opportunément la porte à une autonomie vraie des équipes pédagogiques : elle souhaite une définition des modalités pratiques de répartition des différentes missions [des enseignants] dans le cadre d’un accord annuel arrêté [localement] entre ceux-ci et les responsables des établissements [où ils sont en poste].

Dans le prolongement, les deux recommandations suivantes persistent, avec un souci complémentaire et global de cohérence : « Faire déterminer par les équipes pédagogiques – composées par les responsables d’établissements d’enseignement et les enseignants – les modalités de répartition des moyens d’enseignement et d’accompagnement personnalisé / Mettre en place un système d’évaluation des établissements et des équipes pédagogiques à partir des bonnes pratiques relevées en France et à l’étranger ».

Les deux dernières recommandations enfin veulent plus de moyens attribués dans le cadre de contrats d’objectifs passés avec les équipes pour les établissements confrontés aux plus grandes difficultés scolaires.

L’ouverture vers une délégation – assise sur des contrats d’objectifs contrôlés par des évaluations – aux équipes d’établissement de la gestion des moyens et de la conception des méthodes est assurément un pas en avant essentiel. Serait…. Car, qu’adviendra-t-il de tout cela ? Le ministère qui comme tout bon ministère ne recule devant aucune langue de bois et que n’effraie nulle contre-vérité, a déjà affirmé dans sa réponse que c’était exactement ce qu’il était en train de faire !

A la seule lumière du regroupement en 4-3-2-2-2 de ses 13 recommandations, la Cour des Comptes a clairement pointé :

- la mauvaise gestion du système éducatif

- l’inadaptation de l’organisation scolaire aux besoins des élèves

- l’incompatibilité de la définition actuelle du service des enseignants et de la diversité de leurs missions

- l’absolue nécessité de donner de la responsabilité aux établissements (de les rendre autonomes)

- le problème créé par les établissements confrontés à la plus grande difficulté scolaire et qu’on ne peut abandonner à leur triste sort de ghettos.

Si en elles-mêmes, les préconisations formulées ne sauraient, trop imprécises, constituer un programme de ressaisissement, si même la liste établie néglige trop les questions d’ergonomie pédagogique (la nécessaire réorganisation architecturale des établissements pour s’adapter à une refonte drastique du temps scolaire) et jette un voile pudique sur le grave problème de la compétence des chefs d’établissement (pour ne pas parler de l’incompréhension résolue du problème à résoudre à trop de niveaux de la hiérarchie du système), il y a néanmoins là des pistes de réflexion. Mais on sait assez, pour s’y être déjà engagé, combien les responsables les désertent. La réponse du Ministère annexée au rapport l’affirme d’ailleurs clairement : Pourquoi tout ce bruit quand tout se passe si bien grâce à la pertinence de mes vues et à l’opportunité de mes initiatives. Où donc avez-vous pris qu’il y avait tant de problèmes ? Voyons, voyons, tout est « under control » !

Post Scriptum : Deux coquilles amusantes, et peut-être significatives, dans la réponse du Ministère.

L’année scolaire est devenue l’aimée scolaire.

L’annualisation des horaires s’écrit l’animalisation des horaires.

On peut voir dans le premier cas la résurgence nostalgique de chers souvenirs des grandes vacances, du temps qu’elles s’étalaient complaisamment jusqu’à la fin du mois de septembre.

Il y aurait dans le second comme la remontée d’une perception bestiale du corps enseignant, soupçonné, face à l’autorisation d’auto-gérer ses services, de s’apprêter à se déchirer les opportunités ainsi ouvertes comme des chiens se disputent un os …

Y a-t-il les lapsus innocents ?

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