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AutreMonde
26 février 2019

TOLÉRANCE, LAÏCITÉ, ÉCOLE … PENSÉES DE PRINTEMPS PRÉCOCE ET DE MON BALCON.

 

BALCON

Jean-Michel Blanquer nous rebat les oreilles avec son "Ecole de la confiance", il ferait mieux d'instituer une "Ecole laïque de la tolérance" et regrouper ainsi en une fois deux combats indispensables et convergents.

Sur France-Culture, dans l'émission Répliques qu'Alain Finkielkraut pilote les samedis matins, deux débats se sont succédé en ce début d'année. Le 19 janvier sous l'intitulé La tolérance est-elle une vertu? étaient invités Claude Habib et Pierre Manent. Samedi dernier 23 février, c'était Laurent Bouvet et Philippe Raynaud qui échangeaient avec Alain Finkielkraut sur le thème Qu'est-ce que la laïcité?

En arrière plan, des livres :

Comment peut-on être tolérant? - Claude Habib - Desclée de Brouwer - 2019

Situation de la France - Pierre Manent - Desclée de Brouwer - 2015

La nouvelle question laïque - Laurent Bouvet - Flammarion, 2019

Laïcité, histoire d'une singularité française - Philippe Raynaud - Gallimard 2019

Des ouvrages enrichissants, fouillés, mais dont on se demande toujours, tant la réponse à la question posée nous semble tomber sous le sens et tenir en quelques lignes, s'il n'y a pas, dans le décalage significatif entre les approches érudites et savantes et l'exigence brute d'une mise en application concrète, dans une société épanouie, de principes d'équilibre dont on voit chaque jour combien ils sont fragiles et menacés, la signature de nos impuissances essentiellement verbeuses. Faut-il tant parler pour ne rien faire?

Ils doivent parler, et nous, nous devons, par une prise de conscience collective, faire.

Il faut agir. Il y a le court terme et le long terme.

Le court terme .

Hijab de course

Claude Habib, dans son livre, renvoie à John Stuart Mill (1806-1873). Ce philosophe anglais fut aussi un précurseur du féminisme, je le rappelle compte tenu de ce que je veux en faire. Elle cite son ouvrage De la liberté (1859) : "Les actes d'un individu peuvent être préjudiciables aux autres ou ne pas prendre suffisamment en considération leur bien-être, sans pour cela violer aucun de leurs droits constitués. Dans ce cas-là, l'offenseur peut-être justement puni par l'opinion, mais non par la loi". Or, aujourd'hui, je lis (référence : huffingtonpost.fr) que Décathlon, faisant suite à Nike qui a commercialisé un produit semblable l'année dernière, va mettre en vente un "hijab de course". Il n'y a rien là de "contraire à la loi". Mais bien, à l'évidence, une soumission aux influences convergentes de l'argent et de l'islamisme et qui s'inscrit dans le cadre de l'expansion du voile, attribut "préjudiciables aux autres", agression visuelle qui signe un abaissement insupportable du statut de la femme. Quid alors de la punition par l'opinion à laquelle en appelle Mill? A un affichage public, il faut, je crois répondre par un affichage public du même ordre. Et je trouverais logique, et potentiellement efficace, de tirer parti des beaux jours qui s'annoncent et du printemps qui vient pour porter, face au voile, des T-shirts floqués de slogans comme : "Femmes, osez le dévoilement / Sous le voile, la beauté ment" ou "Soyez donc belles et dévoilées / Dieu n'en sera pas désolé" ou "Femmes! Osez vous dévoiler / Car Dieu aime votre beauté!", etc. L'opinion a besoin d'une masse critique; atteinte et dépassée, elle bascule.

Ce peut même être un coup à faire! Un équipementier français pour relever le défi? Aigle, Lacoste, Le coq sportif, Lafuma, Millet ... Il n'en manque pas.

Le long terme .

Le long terme, c'est l'Ecole. Loin des pitreries auxquelles s'est prêté, ce dimanche 24 février, dans le 20 heures de France 2 et sous la houlette de Laurent Delahousse, face à un Fabrice Luchini dont la pertinence sur la question scolaire relève de l'envolée lyrique nombriliste et non de la proposition structurée, le ministre de l'Education Nationale (voir le billet de Claude Lelièvre qui dit ce qui doit l'être ICI), c'est sur la mise en place d'une pédagogie active de la tolérance et de la laïcité qu'il faut se pencher. J'ai largement détaillé et depuis longtemps  dans ce blog les éléments de ce qui me paraît être l'indispensable refonte du système de la formation initiale, clé de voûte d'un ressaisissement de l'harmonie sociale et de l'épanouissement individuel. J'en ai même rassemblé et publié sous la forme d'une fantaisie sérieuse le bilan (voir ICI). 

Je dirai seulement que pour introduire la tolérance (son enseignement et son effectivité) à l'Ecole laïque, la seule voie réaliste et réalisable est l'enseignement et la pratique de l'argumentation dans le débat contradictoire. Et que dans les perspectives que je défends, l'installation d'une dichotomie de la formation, dont un mi-temps dédié au groupe-classe, encadré-guidé par un binôme d'enseignants bien formés à polyvalence large organisant, en continu, des activités de mise en commun et en perspective des acquis en construction des élèves (acquis gagnés au long d'un second mi-temps voué aux disciplines, confié à d'autres compétences, plus classiques), des activités ouvertes sur le monde, la vie, les échanges autour des questions universelles dans lesquelles s'inscrit le vivre individuel et le vivre-ensemble, des activités relevant du débat, des argumentations croisées, de la prise de recul active, de l'explicitation des questions, de la prise en compte des différences, de la recherche du compromis, de l'arasement lucide des outrances, etc. serait l'outil optimal.

Cette démarche, qui présuppose que l'on redessine une philosophie éducative dont les résultats montrent assez qu'elle est globalement en situation d'échec,  n'est hélas pas en vue. Il y faudrait autre chose que les gestionnaires sans vision qui se succèdent aux responsabilités, juste bons à manier quelques éléments de langage creux et à se prêter à quelques singeries télévisuelles. L'Ecole devrait être la colonne vertébrale de la nation, elle prend le chemin d'en être le ventre mou.

Il ne nous restera que nos yeux pour pleurer.

 

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D
Je suis en train de lire le livre de Jacqueline de Romilly, "L'enseignement en détresse". Le livre fut écrit en 1984. Il est clair, concis, argumenté, prophétique, même. Nous sommes en 2019. De l'eau a coulé sous le pont depuis 1984 quand Madame de Romilly était DEJA sérieusement inquiète devant les évolutions de l'école.<br /> <br /> Et en 1984 elle a vu des choses que j'ai découvertes par la suite, et que sa lucidité, et très grande intelligence me permettent de mieux cerner, et de mieux comprendre.<br /> <br /> Elle me permet notamment de comprendre à quel point l'évolution... fatale... de l'idéologie de gauche a réussi à transformer en pugilat (antagoniste) les rapports sociaux, et comment l'école, le projet de transmettre dans une bienveillance la plus neutre possible, en a fait les frais. (Elle fait cela tout en restant profondément attachée à l'école de la République, sa mission, sa vocation, qui n'est plus du tout ce qu'elles étaient... en 1984, même. L'école a été largement instrumentalisée à l'heure actuelle dans la course à fabriquer du Professionnalisme, autrement dit... la fourmilière en marche, sans la grâce (d'apprendre...ce qui peut paraître sans but immédiat)).<br /> <br /> C'est un triste constat à mes yeux que la pensée de gauche, que j'ai pu défendre avec intelligence, et grâce, pendant de longues années, s'achemine de plus en plus ouvertement vers un projet... totalitaire et totalisant, et ceci, malgré la défaite du communisme historique du 20ème siècle.<br /> <br /> En tant que telle, et au fur et à mesure que son projet totalisant se radicalise, cette idéologie m'aliène de plus en plus, même si je suis forcée d'admettre qu'elle s'appuie fortement sur notre.. héritage religieux chrétien, et je pressens que je ne suis pas seule.<br /> <br /> <br /> <br /> Je suis toute aussi triste de lire sous votre plume ce que j'estime être le dénigrement de "l'envolée LYRIQUE nombriliste" EN TANT QUE TELLE, par l'intermédiaire de Fabrice Luchini (je vous fait remarquer que je ne défend pas Fabrice Luchini, et ne dénigre pas la nécessité d'avoir une pensée pragmatique, je déplore votre attaque sans nuance de l'envolée lyrique EN TANT QUE TELLE, comme symptôme du très grand Mal qui frappe notre société o combien matérialistiquement pragmatique et SANS POESIE, sans fantaisie, sans LYRISME, sans chant).<br /> <br /> Pour le dévoilement des femmes... les faits sont là. Nous sommes grandement pécheurs, devant Dieu (s'il existe, mais là n'est pas la question) et encore plus devant l'Homme, pour qui le devenir de la femme ne peut pas être ramené au seul choix (nombriliste, mais pas du côté de l'envolée lyrique, tristement...) d'un(e)individu dans la seule sphère privée. Le devenir du corps de la femme n'appartient pas seulement à la sphère privée, et individuelle de la femme elle-même. Vous remarquerez que j'ai dit "seulement". Nuance. Il n'y a pas d'équivalence possible entre l'autodétermination de la femme, et de l'homme, pour l'instant, en tout cas, et je ne souhaite pas que nous nous acheminions vers une civilisation qui détruirait les rapports charnels qui nous tissent en tant qu'êtres de chair, donc, nés, et promus à mourir. Plus radicalement encore, je crois que le jour où le "progrès" scientifique nous conduirait à dissocier NOTRE venue au monde du passage dans le ventre (bienveillant/hospitalier...) d'UNE FEMME, nous mourrons en tant qu'Homme. Pour ma part, je ne souhaite pas appartenir à une espèce qui aurait "réussi" cette prouesse technique.<br /> <br /> Comme quoi vous voyez bien que le devenir de la femme est bien une question de société ET POLITIQUE. Il concerne la collectivité.<br /> <br /> Je crois que nous allons nous battre autour de cela. Je ne sais pas comment, mais nous nous battons déjà, et ce n'est pas fini.<br /> <br /> Enfin, vous remarquerez que j'ai fait cette analyse sans me référer une seule fois à une institution religieuse, et à aucune confession particulière. Il est donc possible de faire cette analyse... sans invoquer les religions, même si je préfère de loin m'appuyer sur un héritage religieux que je ne peux pas pleinement m'approprier à l'heure actuelle. Madame de Romilly pouvait faire de même d'ailleurs.<br /> <br /> Et enfin... Antigone n'était pas chrétienne...
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