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AutreMonde
1 décembre 2015

LA VERITE SUR L'AFFAIRE HARRY QUEBERT

Joël Dicker

La vérité sur l'affaire HQ

La réception des livres est quelque chose de fascinant.

Ce bouquin de Joël Dicker, par exemple, paru en 2012, qui s'est retrouvé sur la liste du Goncourt, a reçu finalement le Goncourt des lycéens, le Grand Prix du roman de l'Académie française, et le prix de la vocation Bleustein-Blanchet, ce bouquin-là, donc, est d'une nullité littéraire accomplie. C'est un roman de gare archétypique, ficelé en thriller totalement invraisemblable, doté d'une intrigue qui n'a pas une once de crédibilité … et qui se voit en quatrième de couverture soutenu par les jugements suivants : 

« C'est rare, mais quand cela arrive, rien ne peut couper court à l'excitation. Jeune ou moins jeune, lecteur difficile ou facile, femme ou homme, on lira sans discontinuité jusqu'au bout le roman français de Joël Dicker, La Vérité sur l'Affaire Harry Quebert. On n'en sortira qu'épuisé et ravi par le jet continu d'adrénaline littéraire que le narrateur n'a cessé d'injecter dans nos veines. » Marc Fumaroli (Académie Française et Collège de France) dans Le Figaro Littéraire

 

« Si vous mettez le nez dans ce gros roman, vous êtes fichus. Vous ne pourrez pas vous empêcher de courir jusqu'à la six centième page. Vous serez manipulé, dérouté, sidéré, agacé, passionné par une histoire aux multiples rebondissements, fausses pistes et coup de théâtre. » Bernard Pivot (qu'on ne présente pas) dans Le journal du Dimanche.

Ces enthousiasmes me sont incompréhensibles. Avec le bémol suivant : le bouquin est nul, mais je l'ai quand même lu en trois jours. Et c'est sans doute cela qui a fait son succès. Rien là-dedans ne tient debout, mais on a quand même envie de savoir. On continue donc, sans l'avouer à ses proches, l'oreille basse compte tenu de la pauvreté littéraire de l'ouvrage, du caractère affligeant des passages romantiques, de l'inexistence psychologique des personnages, stéréotypes approximatifs du romanesque ferroviaire, de l'accumulation de coups de théâtre dont dix pour cent devraient suffire à nous faire abandonner ce pavé à son triste sort … on continue et même on accélère, car on se dit qu'on perd son temps et qu'à ce compte-là, autant le perdre le moins longtemps possible, pour revenir enfin à des activités plus sérieuses.

Et à la fin, eh bien, c'est fini! On a honte mais ... on a lu.    

Dans l'affaire, outre le Harry Quebert du titre, héros passif, le véritable héros, actif, est un certain Marcus Goldman, jeune écrivain de génie (on n'en voit pas les traces) dans lequel Joël Dicker a assurément mis beaucoup de lui-même (!) et dont il m'a beaucoup amusé qu'il soit l'homonyme intégral du fondateur de la banque Goldman Sachs.

Marcus_Goldman

On notera que ce Marcus Goldman là (ci-contre), né en 1821, qui émigre aux USA en 1848 pour y mourir en 1904, a ici un livre à la main. Je suis certain qu'il est en train de lire La vérité sur l'affaire Harry Quebert, affirmation à peu près aussi vraisemblable que n'importe quelle péripétie du bouquin de Joël Dicker.

Sacré coup d'édition! En octobre dernier, on en était à trois millions d'exemplaires vendus, dont la moitié en français.

Tiens, pour un prix équivalent, j'ai un truc aussi palpitant (mais si!) à vous faire lire: Roman-Roman, d'Auguste Sejan . En octobre dernier, il s'en était déjà vendu une petite dizaine d'exemplaires !!!

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Commentaires
D
Et oui.. en ce moment le monde n'est plus du tout ce qu'il était, il y a si peu.<br /> <br /> Est-ce que cela arrive à toutes les générations ? Difficile à dire.<br /> <br /> J'ai comme ma petite idée que ma mère (née en 1920) a été épargnée cela à la hauteur de SA mère, née en 1888, ou nous, à l'heure actuelle, pour qui ça va SI vite que dans l'espace de deux ou trois ans, le monde (le nôtre) PEUT devenir.. méconnaissable...<br /> <br /> Internet étant sur la même longueur d'ondes que l'invention de l'imprimerie qui a mis le feu au poudres et rendu la Réforme (mot qui avait la cote bien avant d'être dans la bouche de François Hollande...) une bombe pestilentielle, nous vivons peut-être le même effarement, égarement que nos lointains ancêtres.<br /> <br /> Comme quoi la faible chair est bien faible devant l'ampleur du pouvoir.. destructeur du Mot (je ne dirais pas Verbe, car nous nous acharnons à tuer le verbe où qu'il lève sa pauvre tête à l'heure actuelle).<br /> <br /> Je viens de terminer "Le Manoir" d'Isaac Bashevis Singer, où il est question des suites de la destruction de l'aristocratie polonaise, et la féodalité attenante, en 1863, surtout dans les effets produits sur des communautés juives autonomes, et marginales, Hassidim ou pas.<br /> <br /> Passionnant. Là aussi, on n'a pas envie de poser le livre, tellement il est bien écrit dans un style littéraire admirable, truffé de portraits de personnages dessinés avec finesse psychologique.<br /> <br /> Il y a des pages qui POURRAIENT nous faire réfléchir au choc sismique qui retentit quand les hommes et les femmes, perdant leurs repères avec le retrait de la foi religieuse (et les pratiques religieuses) de leurs ancêtres, s'engouffrent dans des croyances idéologiques en lieu et place. Et le monde qui émerge en conséquence...<br /> <br /> Très édifiant. Beaucoup mieux qu'un livre d'histoire, ou qu'un cours de socio, en plus.
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