UT OPERARETUR EUM … ( Génèse II, 15 )

Car, quand l'homme fut mis dans le jardin d'Éden, il y fut mis «ut operaretur eum», pour qu'il le travaillât, ce qui prouve que l'homme n'est pas né pour le repos. (Voltaire – Candide)

Terra Nova, think tank socialiste, apparu au temps de la splendeur de celui-ci comme strauss-kahnien (en s'en défendant), et désormais hollandais (?),  a publié ce 6 mars une étude , une note, titrée " Pour une école commune, du cours préparatoire à la troisième : un pas supplémentaire vers la démocratisation"

       JP.O/C.K./G.L./C.V.

       J.M./ RF.G./JM.Z.

Les sept auteurs de cette étude sont: Jean-Pierre Obin, inspecteur général de l'Education nationale honoraire; Claire Krepper et Gilles Langlois qui ont des responsabilités à temps plein au Syndicat des enseignants-Unsa; Caroline Veltcheff , Inspectrice pédagogique régionale (Vie Scolaire), attachée au Syndicat de l'inspection de l'Education nationale - Unsa; Julien Maraval qui avait des responsabilités au Se-Unsa avant de devenir proviseur-adjoint; Roger-François Gauthier, inspecteur général de l'administration de l'Education nationale et de la Recherche et membre du Conseil supérieur des programmes; Jean-Michel Zakhartchouk, agrégé de Lettres à la retraite et membre du bureau du CRAP (Centre de Recherche et d'Action Pédagogiques – Association Loi 1901). Cinq hommes, deux femmes. Parité? Quatre syndicalistes affiliés à l'Unsa, soit deux personnels détachés, un(e) IPR et un proviseur-adjoint, plus deux inspecteurs généraux et un professeur à la retraite, aucun enseignant du terrain en activité. Equilibre? Le panel est assez inquiétant.

Reste le résultat et les propositions . A examiner.

Examen subjectif. Je ne reprends et ne souligne que ce qui, même incomplet/imparfait m'a semblé aller dans le bon sens. Si relevé de conclusions il y a, il est donc biaisé. J'ai occulté des divergences.

• 1-   (…)  lancer un vaste plan pluriannuel de formation et d’accompagnement professionnel des professeurs enseignant en école et en collège  : se méfier des "vastes plans". Réfléchir plutôt au niveau de l'établissement, d'un réseau d'établissements.
• 2-  Communiquer sur la nécessité d’une réforme de l’école obligatoire en se plaçant sur le terrain des valeurs (…) une réforme tournée vers la réussite des élèves : saine pratique.
• 3-   (…) développer les initiatives des nouveaux conseils écoles-collège pour développer le travail en commun sur l’ensemble de la scolarité obligatoire (… et …) mobiliser l’encadrement dans un pilotage dynamique de la réforme:  saine perspective.
• 4-   (…) confier la responsabilité des écoles et des collèges à la même collectivité: soit.
• 5-   Fusionner les corps de professeur des écoles et de professeur certifié de manière à favoriser la mobilité professionnelle et l’utilisation de toutes les compétences sur l’ensemble école-collège: prémices néanmoins insuffisantes d'une refonte du corps enseignant  adapté à une révision des cursus de la formation initiale.
• 6-   Donner davantage de pouvoir et de responsabilité aux équipes enseignantes:  oui, et même «beaucoup davantage», pour reprendre Joachim Du Bellay. Ce qui sous-entend une redéfinition et une opérationnalisation de la notion d'autonomie des établissements / réseaux d'établissements.
• 7-   (…)  mettre en place des réseaux écoles-collège constituant des unités d’enseignement de taille suffisante pour en faire des lieux de développement professionnel continu, dans le souci d’accroître l’autonomie et la responsabilité des équipes qui les composent: oui.
• 8-   Développer l’encadrement chargé d’accompagner les équipes dans un climat de confiance, [via] des missions d’animation pédagogique et éducative (coordination de réseaux, de projets, de niveau, de champ disciplinaire...) assurées par des enseignants et des personnels d’éducation: oui, enfin… le redéfinir et l'organiser! L'existant ne suggère pas un "développement".
• 9-   (…)  mettre en place un pilotage intégré et dynamique du développement des conseils des réseaux écoles-collège  (…) lever les obstacles administratifs à [des] collaborations, actions et formations communes: oui, et cela renvoie au 8. précédent
• 10-  (…) laisser subsister les institutions et les responsabilités actuelles mais prendre acte de la continuité école-collège (…) faire un bilan des nouveaux conseils écoles-collège au bout d’un an puis entreprendre les modifications nécessaires:  on est dans la logique du «Continuer d'abord, commencer ensuite» attribué au psychologue américain William James (1842-1910, neveu d'Henry), qui l'aurait emprunté à Horace Walpole (1717-1797, inventeur de la sérendipité et amant platonique de Mme du Deffand, de vingt ans son aînée). C'est une bonne logique. Elle peut servir, mais enfin, j'aimerais un peu plus d'idées préconçues sur la suite.

• 11-  Faire de la recherche de la mixité sociale, ethnique et scolaire des établissements et des classes un « impératif catégorique », une priorité réelle se traduisant par des procédures nouvelles de gestion de la carte scolaire (…):  il faut rétablir la carte scolaire, strictement, dans le cadre de la réinvention d'une société uniformément rééquilibrée et re-diversifiée. La question est immense et déborde l'école, mais celle-ci peut contribuer à lui donner des éléments de solution.
• 12-  Définir les obligations professionnelles par niveau d’enseignement et non par corps: c'est à réinscrire dans une refonte générale du métier, mais c'est une bonne idée de base … à dissoudre dans l'émergence d'un corps enseignant unifié.
• 13-  (…) mettre en place dans chaque académie un dispositif d’aide et de soutien de proximité aux équipes enseignantes ; mobiliser les personnels de direction et d’inspection autour de ces dispositifs: outre que cela recoupe le 8. précédent, la seule référence aux personnels de direction et d'inspection doit servir à souligner à quel point la redéfinition complète des profils, rôles et missions de ces personnels sont à revoir.
• 14-  (………) .

Je passe sur toute une argumentation de la note prévoyant en amont les thèmes de dénigrement du projet. En réalité, la refonte de notre système éducatif relève de l'exigence absolue et de l'impératif catégorique. Le seul blocage réel réside dans la pusillanimité à ce jour des responsables politiques qui ont été et sont à la manœuvre sans parvenir à en concevoir l'urgence et les nécessaires contours.

Je n'ai pas rendu compte ici, loin s'en faut, de tout. Je n'ai repris que ce qui me semblait aller dans le bon sens. Un vrai projet, dur et complet reste à écrire.

La dichotomie des cursus que j'ai prônée dans "Scolarité Obligatoire?"  et les conséquences qui s'en déduisent me paraissent plus proches du ressaisissement souhaité du système que les éléments retenus de la note de Terra Nova, alourdie qu'elle est  par ailleurs de quelques idées fausses que je n'ai pas citées. Il y a pourtant là, et avec une surface médiatique dont je ne dispose pas, des éléments de discussion utiles.

Et il pourra être utile aussi de dépasser mon commentaire et de se reporter à l'étude de Terra Nova elle-même : {http://www.tnova.fr/note/pour-une-cole-commune-du-cours-pr-paratoire-la-troisi-me }

Il faut encore et toujours travailler : Ut operaretur eum .

Comments

[Debra]

Juste un petit mot d'anglophone là...

Saviez-vous que le mot "crap" en anglais veut dire... "merde" ?

Intéressant, non ?

Dans le contexte de colonisation américaine avancée où se trouve la satellite française, il serait souhaitable d'éviter des acronymes aussi explosifs...

S'il y a quelque chose qui me mystifie, c'est la tendance actuelle à estimer que "nous" contrôlons, que nous avons la maîtrise, sur des choses sur lesquelles nous avons réellement très peu de maîtrise.

L'école est le bras droit de la République.

Elle était pensée pour former le citoyen de la République.

Il me semble indispensable de ne pas perdre de vue les très grandes lignes qui fondent le couple "école/République".

Alors... quand ça va mal, QU'est-ce qui va mal ?

Comment l'école pourrait aller bien quand la République va mal ?

Comment la République pourrait aller bien quand l'école va mal ?

C'est quoi, aller mal ? Le taux d'abstention aux élections, et d'absentéisme à l'école, par exemple ? Je crois. Je crois que nous n'avons plus.. la foi nécessaire dans "notre" religion laïque pour défendre la République, et l'école. Je crois que nous sommes encore une fois, de petites brebis bien égarées. Et fiers de l'être, par dessus le marché. Navrant.

Ne croyez pas pourtant que je suis une ardente défenseur de la République.

Je n'aime pas qu'on l'attaque pour ce que j'estime être de mauvaises raisons, pourtant, probablement un peu comme.. Voltaire, qui était un penseur parmi les moins éclairés des éclairés. Dommage qu'il soit porté aux nues encore par tant.