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AutreMonde
6 mars 2008

Spieprzaj dziadu !..

Si j’en crois Éric Azan (le Monde / Di.2-Lu.3 mars / page 15), cette imprononçable (pour moi) apostrophe serait - anteproférée le 4 novembre 2002 par Lech Kaczynski, alors maire de Varsovie, au bénéfice d’un quidam qui l’interpellait dans la rue - un excellent équivalent polonais du “Casse-toi, pauvre con!” présidentiel, au salon de l’agriculture, l’autre week-end.

Sotte affaire. Les médias se sont précipités sur ce qui - vidéo regardée, il fallait bien se faire une opinion personnelle - m’a semblé une vraie peccadille. Les politiques n’ont évidemment pas été en reste, Laurent Fabius en tête, l’un de nos plus remarquables faux-culs, que j’avais en son temps trouvé autrement ridicule dans sa fatuité blessée, se rengorgeant lors d’un débat sauf erreur avec Chirac d’un “Vous oubliez que vous parlez au premier ministre de la France!” de cour de récréation .... Dieu que c’est con, un prétentieux sur ses ergots! Peut-être faut-il l’être, pour réussir ... Quoi donc, prétentieux ou con? Les deux j’imagine ...

Mais enfin là, agacement de lassitude, que voyait-on, qu’entendait-on? Un président qui ne me compte certes pas dans ses thuriféraires et dont les courtisans qui l’entourent ne m’inspirent de sympathie que modérée, mais un président seulement un peu tendu, un peu “à cran”, en visite démagogico-traditionnelle un peu ennuyeuse, et qui tombe sur une de ces stupidités bornées qui ouvrent des horizons inquiets quant au niveau de réflexion de ceux qui les émettent (en l’occurrence: “Ah non, touche-moi pas ... tu me salis”). Niveau de réflexion et de formation: on aura noté au passage le style, la tournure grammaticale probablement pas à prendre au second degré ...
Dès lors, je l’ai trouvé bien modéré, pour cette fois, Sarkozy, presque “cool”...

Et puis, dans le numéro de mardi 4 mars, Laurent Greilsamer s’interroge à juste titre: “Une bonne semaine après l’échange d’amabilités entre Nicolas Sarkozy et le “pauvre con” du Salon de l’Agriculture, nous ne savons toujours rien du “pauvre con” en question. Bizarre ...”.

Bizarre effectivement. Pas un seul “journaliste d’investigation” pour mettre la main sur le bonhomme? D’où sortait-il et peut-on vraiment par hasard se trouver ainsi au contact du premier personnage de la République? Peut-être, mais en tout cas, une “Interview du con” aurait pu être “vendeuse”... et personne ne l’a tentée.... Décidément bizarre.

Sur le fond, et après réflexion, je ne suis d’ailleurs pas d’accord avec les culs-pincés qui s’offusquent du dérapage verbal, dignité présidentielle en bandoulière. Dans un premier temps, c’est vrai, j’ai moi-même trouvé scandaleux - sur la foi de ce que m’en rapportait la radio - le manque de maîtrise de soi affiché. Et puis j’ai vu les images ... Je croyais à un affrontement ridicule de coqs, à une fausse altercation sur le mode du sot “Descends si t’es un homme” de l’échange antérieur avec les pêcheurs du Guilvinec. Mais pas du tout. Il n’y a là qu’agacement, relâchement fatigué de l’expression, constat d’inopportunité sans aucune violence: “Qu’est-ce qu’il fout là celui-là s’il ne veut pas me croiser? On ne l’a pas obligé à venir...”.

Et il y a autre chose, en marge certes, mais à dire. La correction de l’expression mérite quelquefois d’être violée, avec ce souhait que ce soit non sous le coup de la colère, donc avec perte de contrôle, mais dans le cadre d’une recherche d’optimisation de l’impact du “prononcé”. Le “bien parler”, quand il n’est que convention guindée, m’agace et l’utilisation provisoire d’un langage ordurier peut apparaître parfois comme le seul recours pour faire passer en force une idée. On ne vit pas que de litotes.

Pour en rester au sujet, l’apostrophe sarkozienne n’a jamais fait que situer son niveau de langue à hauteur de celui de l’interlocuteur, accroissant ainsi les chances d’être mieux compris .... À quelqu’un qui vous dit: “Touche moi pas, tu me salis”, va-t-on répondre: “Qu’en termes élégants ces choses-là sont dites... J’aimerais mieux ne pas les avoir entendues. Passez votre chemin, Monsieur, si je vous importune”. Non. En gros, plutôt, on balance: Ou je l’ignore, sagesse, ou je lui “mets un pain”, virilité rugbystique. Je plaide pour la sagesse, à tout prendre, mais enfin il y a des coups de pied au cul qui se perdent.... L’entre-deux de Sarkozy n’a marqué qu’une hésitation de fatigue. Humain. Trop humain? Pour être Président, on n’en est pas moins homme. Ego te absolvo.....

La presse a rapporté l’esprit de répartie de Chirac, traité de “Connard” : “Ah? Enchanté, moi, c’est Jacques Chirac”. En fait, Chirac, qui a montré en l’occurrence du sang-froid, de l’humour et des lectures, a démarqué un échange célèbre d’Edmond Rostand dans Cyrano de Bergerac (Acte I - Scène IV):

(...)
Le vicomte:

Maraud, faquin, butor de pied plat ridicule!

Cyrano (ôtant son chapeau et saluant comme si l’autre s’était présenté):

Ah? ... Et moi, Cyrano-Savinien-Hercule
De Bergerac.

Cyrano est un chef-d’œuvre impérissable et je ne me suis jamais vraiment remis d’y avoir, à quinze ans, aimé Roxane.

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Commentaires
G
J'ai fait partie de ceux qui se sont offusqués (avec un enthousisme non dissimulé) de cette nouvelle "perle" de (respect de la Démocratie oblige)"notre Président".<br /> Votre saine faculté de distanciation peut être positivement contagieuse.<br /> <br /> Sur les registres de langue:<br /> - d'accord sur l'émancipation parfois nécessaire du "bien parler" guindé<br /> - pour les citations latines,c'est vrai qu'on pourrait deviner ou chercher dans les livres, mais, en ce qui me concerne, la traduction ne serait pas perçue comme un mépris pour les incultes.
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