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AutreMonde
28 octobre 2007

Reparlons en un peu, Finkielkraut ...

J’ai écouté Répliques sur France-Culture, hier matin, samedi 27/10. Au chevet de l’école, ce grand corps malade désormais radiotélévisé puisque vous repreniez l’intitulé d’un documentaire d’Arte, sans souligner d’ailleurs - ce qui pourtant ouvrait à réflexion - qu’il s’agissait aussi du nom de scène d’une vedette du Slam, cette plainte psalmodiée du mal de vivre djeune, vous aviez convoqué un professeur de lettres en collège difficile, Cécile Revéret, et Jean-Marie Petitclerc, ex-polytechnicien et ci-devant spécialiste de terrain de l’adolescence à problèmes (Institut Le Valdocco). La première était des quelques témoignages forts (c’est vous qui le dites) de l’émission d’Arte, le second vient de publier un livre chez Bayard (Lettre ouverte à ceux qui veulent changer l’école; 15 € - ... je tâcherai de lire) et rame depuis peu dans le bateau de Christine Boutin, embarquement vaguement surprenant (mais je manque d’information).

Répliques, donc. Assez décevant. Vous ne parvenez pas à vous arracher, sur l’école, à vos ancrages obsessionnels, dont l’enfouissement dans un terreau culturel qui fit les beaux jours de la logique élitiste du lycée napoléonien vous empêche d’imaginer qu’il reste des voies à explorer pour concilier le bon, le beau et l’efficace en termes d’enseignement de masse. D’une certaine façon, vous avez, pédagogiquement, la pensée unique et l’orientation monophasée. Et c’est regrettable.
Il est patent que le maintien de l’enseignement - d’un enseignement ouvert à tous - dans le sillon de la classe comme groupe d’auditeurs obligés d’un discours qu’on constate inécouté, incompris et inassimilé, conduit à une alternative. Soit changer le discours et, dans l’abandon des exigences, saborder l’école à vouloir se mettre à la portée du client. Soit se raidir sur ses positions, et à cheval sur les saintes colères qu’aiguillonne l’effondrement d’à peu près tout, se ruer sabre au clair sur le troupeau des incapables sommés de se moucher, de se tenir droit, d’apprendre la leçon et, comme un ministre chevénementisé, de fermer leur gueule. J’ai caricaturé d’abord les pédagogistes - Honte à toi, Ô Meirieu ? - ensuite les républicains - Un pour tous, tous pour Brighelli? -, dont vous vous honorez d’être. J’ai caricaturé. Aujourd’hui comme hier: in medio stat virtus.

Répliques : Cécile Revéret, sans doute excellent professeur, ringardisait modestement sur ses méthodes simples, classiques, efficaces. Je ne prétends pas qu’elle a tort, il faudrait l’aller voir en classe, mais que quelle que soit sa réussite, elle n’est qu’individuelle et l’arbre, alors, qui cache la forêt. Et cet angle d’attaque du problème, ce sous-jacent: “Faites comme moi, voyez, ça réussit”, est une erreur de stratégie, tant il faut repenser l’ensemble du système et non s’améliorer dans un système maintenu où on ne peut espérer que des succès ponctuels (sans impact statistique). Que m’importe Mozart, et qu’on me l’assassine. Il faut reconstruire une société qui se délite, et L’esquive au fond (le film d’Abdelatif Kechiche - puisque vous en avez parlé), dût-on croire - ce qui n’est pas mon cas - au dialogue de classe qu’on nous y montre, marque à y bien regarder suffisamment l’échec, l’inanité, d’une Thérapie Marivaux. Tiens, phonétiquement, ça sonne bien, ça: Térapimarivo, ça fait très Ukulélé et Colliers de fleurs, c’est à peu près tout ce que les gamins en retiendraient...

Jean-Marie Petitclerc était m’a-t-il semblé un peu sur la réserve, pas franchement en désaccord, mais sensible au décentrement d’une préoccupation - la vôtre - qui s’exprime en termes culturels, sans intégrer ce noyau dur qu’est la gestion d’un public scolaire totalement inadapté à vos attentes. J’y reviendrai quand j’aurai lu son bouquin.

Vous campez trop, Finkielkraut, sur vos positions, et vous n’aimez guère la contradiction (votre sortie sur Daniel Pennac, qui semble-t-il vous conteste, et que, lui aussi, je n’ai pas, décidément mauvais élève, encore lu). Vous avez de bonnes raisons, mais pas raison sur tout, et tout n’est pas dans Hannah Arendt, et les stances du Cid ne sont pas la solution du bordel ambiant. Petitclerc est dans le vrai, soulignant la nécessité d’élever, de porter vers le haut, les élèves et c’est seulement dans le cadre d’une reconfiguration complète du système scolaire qu’on peut l’espérer. Et il me semble que ce Répliques est totalement passé à côté de cela, qu’il aurait fallu mieux cerner, et dire.

Vous êtes dans Le Monde de mercredi 24/10 dernier, dans le corps de l’article titré: X.Darcos veut “retrouver un consensus républicain” sur l’école. Je cite: “ (...) ouverture ministérielle (...) dialogue chaleureux avec Philippe Meirieu (...) Parallèlement, M.Darcos n’oublie pas ses “amis” du bord opposé. Il a reçu le 25 septembre, Alain Finkielkraut, professeur à l’école Polytechnique et contempteur de la “pédagogie moderne”. “Je lui ai proposé de venir avec moi dans un établissement sensible”, confie-t-il (...)”.
Drôle d’invitation. Darcos lui-même ne sait pas ce qu’est un établissement sensible et combien, à y enseigner et quoi qu’en ait dit Cécile Revéret, on y perd ses repères et pour survivre, d’expérience (cf. JournalBerlioz - http://jobohebo.canalblog.com), on risque fort d’y manger son chapeau. Vous n’y serez que conforté dans vos a priori si vous n’y êtes pas roulé dans la farine des visites officielles.
Mais enfin, vous voyez Darcos et donc Darcos vous voit, et ce n’est pas le discours étroit de la-culture-qui-fout-le-camp qu’il faut lui tenir, la sienne est bien accrochée, la vôtre aussi. Pensez donc d’abord plus petit, pensez boutique, pensez fonctionnement, pensez ceci: Le système éducatif est malade de ses cadres (corps d’inspection, chefs d’établissements ... Ah! Les chefs d’établissements! ...) - Les établissements doivent être autonomes pour permettre aux équipes pédagogiques de naître, croître, prospérer et agir localement - Le métier d’enseignant doit être remis à plat et rebâti à temps plein dans des établissements complètement reconditionnés pour un exercice équilibré et efficace de ce nouveau métier - Les cursus scolaires doivent être dichotomisés, deux mi-temps: l’un de construction sociale sur la base de classes hétérogènes de même âge où le “pédagogisme” pourra s’employer, l’autre de poursuite de l’excellence individuelle sur la base d’unités de valeur cumulables par champs disciplinaires indépendants, enseignées et validées dans des petits groupes homogènes sans critère d’âge, où les “républicains” déploieront tous leurs talents et brilleront de tous leurs feux. Dites-lui donc cela, qui mériterait plus que des développements mais marquera ici une direction. Et dites-lui aussi que sa politique des petits pas est une politique du sur place, et qu’énonçant: “Dans l’éducation, on ne vit plus sous l’empire de la grande réforme. Lorsque vous montez une citadelle, vous déclenchez l’assaut général. Ce qu’il faut, c’est un processus de lente appropriation”, il nous fournit le mode d’emploi de son inefficacité annoncée. Peut-être aussi de son maintien en fonction?

Il faut une réforme drastique. Et convaincre. Objections dirimantes exclues!

Z’y va, le keum! Dratisque, Objections quoi? D’où qu’y sort ça? Ah le bouffon! Comment qu’y cause la France! Ça va êt’ encor’ plus chaud à l’école que dans la téci!

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