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AutreMonde
26 septembre 2007

Bis repetita ou N-repetita? ...

Objectif au fond affligeant: “Revaloriser le métier d’enseignant”. Le Monde du week-end (Di.23 - Lu.24/09). Un article de Luc Cédelle. Un autre de Catherine Rollot. “Le travailler plus pour gagner plus n’effraie plus les enseignants” . Pourquoi pas “Enseignant ne rime plus avec feignant” ? Passons.
Pauvreté des perspectives si on les limite à cela devant la grandeur (oublions les multiples décadences) des missions. Misérabilisme des effets d’annonce face à l’exigence des redéfinitions. Pourquoi X. Darcos, emboîtant le pas à N.Sarkozy, réduit-il à des ratiocinations qui finiront par n’être que comptables (..."il y a un moment où il faudra des crédits...") ce qui devrait être une réflexion de fond sur les objectifs de la formation des élèves et leur nécessaire traduction en termes de formation des maîtres? Qui recruter et comment et pour faire quoi? En déroulant le programme à l’envers: Que veut-on obtenir et faire? À qui le confier ?

Travailler plus est aberrant si c’est pour faire la même chose, qui ne fonctionne pas. Il faut changer le métier. Et ce métier redéfini, il faut effectivement lui associer un traitement décent, reconnaissance par la société du caractère essentiel des tâches attribuées.
Bon, soit: évacuons les chiffres pour pouvoir revenir au fond.
Un statut enseignant unifié, un concours unique (vocabulaire d’aujourd’hui: niveau bac+5) à options de spécialisation (dont une option polyvalence), une évolution de traitement (de carrière) uniforme (l’avancement au mérite est incompatible avec l’engagement pédagogique) de 36 000 euros (début) à 54 000 euros (fin) annuels. Ni primes, ni heures supplémentaires, pour un service plancher à 35 heures hebdomadaires dont trois à disposition pour formation continuée, sans autre dépassement de volume que celui, dès lors sans maxima, dicté par le degré de l’investissement personnel.
Précisons encore la projection: à euros constants, étalement de carrière linéaire sur trente-six ans, en douze échelons de stabilité de trois ans, chaque changement d’échelon valant augmentation mensuelle de 125 euros.
Et fermons le ban.

Cela posé, qui lui permet de vivre correctement, c’est dans son environnement de travail que l’enseignant doit lire l’amélioration de ses conditions de productivité pédagogique et éducative. Rénovation/Restructuration des locaux d’enseignement, salles de réunion, bureaux, équipement bureautique, bibliothèque, espaces de détente ... les équipes enseignantes - et c’est dès le départ la condition sine qua non (à ce jour non remplie, ce qui explique bien des choses) de leur réalité - doivent trouver sur place toutes les facilités matérielles de l’élaboration et de l’opérationnalisation d’une politique éducative locale, toutes les conditions d’un travail à la fois personnel et collectif/collégial de prise en charge et d’encadrement des élèves.

C’est réellement là le chantier initial: la pédagogie ... par le BTP! Les besoins sont immenses. Et, sauf à renoncer à la réussite annoncée d’une transformation du métier et d’une renaissance du système éducatif, l’esquisse posée n’est pas même négociable! Alors des crédits, évidemment, mais au moins en sachant pourquoi ....

Au delà, quel péan entonner? Toujours le même, et déjà trop vainement chanté:

[I] Unifier l’école et le collège dans un même champ de la scolarité obligatoire, réduisant ainsi à trois les étapes possibles d’un cursus complet de formation initiale: l’obligatoire, donc, puis le secondaire (lycée), puis le supérieur (L-M-D).

[II] Sur les deux premières étapes, distinguer résolument deux mi-temps. L’un doit former l’homme dans sa citoyenneté. L’autre dans sa compétence. Le premier nécessite des groupes homogènes en âge, dans toute la diversité de leurs origines, de leurs blocages, de leurs tensions, de leurs attentes, de leurs défauts, de leurs espoirs et de leurs intolérances. Il y faut des professeurs polyvalents, à la formation spécifique, intervenant sans doute en binôme, pour gérer des activités permettant l’expression guidée des élèves dans leur désir de comprendre le monde, et fournissant à ce désir des réponses non dogmatiques, documentées, équilibrées, comme lui permettant sa réalisation dans des apprentissages de base, relayant le lire-écrire-compter des nostalgiques de Jules Ferry en un s’informer-s’exprimer-dialoguer-comprendre qui nécessairement l’inclut en le modernisant.
Le second mi-temps, celui de la compétence, exige des groupes formés sans blocage sur des critères d’âge, mais strictement homogènes en termes de niveau, d’acquis. C’est un mi-temps réparti sur des activités optionnelles, correspondant à des champs disciplinaires séparés, choisis, chaque champ et dans ce champ chaque niveau d’acquis déterminant la composition du groupe pour une étape courte de progression que validera la délivrance d’une unité de valeur. L’encadrement de tels groupes réclame des professeurs spécialistes du champ concerné, dans une pédagogie dont il y a, probablement magistrale, peu d’inventivité à attendre et qui pourra - acceptation volontariste induite par les choix optionnels - rejoindre “la sueur et les larmes” chères à Finkielkraut (cf. mon précédent billet ...).

[III] Dans la logique du [II], on pourra prévoir une certification de type “fin d’études (obligatoires / secondaires)” garantissant une maîtrise satisfaisante des notions de base et des pratiques associées au mi-temps d’ouverture à la modernité citoyenne. On saura, parallèlement, que c’est le cumul des unités de valeur du mi-temps de compétence dans les champs de spécialité choisis qui forgera le profil d’excellence individuelle adossés auquel se détermineront les entrées dans la vie active ou les prolongements d’étude (accès au lycée; accès au supérieur)

Je redis que je crois - seule - cette schématisation dichotomique de nature à ouvrir le système éducatif aux renouvellements qu’il réclame. Et je redis que c’est autour d’elle que devraient se penser :

- la formation, pour un statut unifié, de deux types de maîtres (polyvalents / spécialistes)
- la nécessité de se saisir, dans des équipes éducatives gestionnaires autonomes de leurs moyens matériels et humains, implantées dans des établissements reconfigurés, de la question globale des formations initiales en déterminant, face aux populations scolaires locales, les tactiques pédagogiques adaptées.

Je redis enfin qu’une telle profession de foi implique la mise en place d’un filet de sécurité (et d’impulsion-guidage) préservant d’une anarchie trop brownienne la poursuite à l’échelle d’établissements autonomes des grands objectifs nationaux, ce qui veut dire une réorganisation complète des actuels corps d’inspection ... et qui remet évidemment en cause la notion de “chef d’établissement attribué”, quand le développement d’un projet éducatif local induit logiquement la désignation élective au sein de l'équipe, pour un mandat de sa durée, d’un “chef d’établissement - porteur de projet”.

La Commission “pour l’évolution du métier d’enseignant” qui devait être installée ce lundi 24/09 ira-t-elle dans ce sens? Il y a là du beau monde. Est-ce une garantie de pertinence quand le départ du problème est au plus près du terrain, d’un terrain qu’il faut connaître au ras des pâquerettes, depuis l’estrade, pour y savoir le désespoir aujourd’hui d’enseigner, et l’inusable espoir, demain, de le mieux faire?

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