10 juillet 2006
M’sieur, il a traité ma mère ....
Quelle tristesse cette fin de parcours de Zidane. Probablement insulté, le voilà qui oublie l’enjeu, les règles, le bon sens, les autres, comme un môme en cour de récréation... ou en classe. Tous les enseignants de collège connaissent ça par cœur . Une bagarre, des cris, des bousculades et des coups et puis l’explication suprême, la justification absolue : “M’sieur, il a traité ma mère”. Le complément attendu s’est depuis longtemps perdu dans les usages du parler “djeune”. On ne sait pas si maman a été traitée de salope, de pute, ou de sale juive, si on a promis de la niquer ou si on a affirmé (plus lapidairement que ce qui suit) haut et fort son goût prononcé pour les fellations, on sait - et pour le gamin, cela suffit et prend tout son sens - qu’elle a été “traitée”.
Variantes : “Il m’a traité” ou “Il a traité ma sœur” etc...
On ne saura sans doute jamais ni qui, au juste, Materazzi a “traité”, ni de quoi, mais l’affaire est claire, c’est de cette parole coupable et non explicitée qu’il s’est trouvé puni et, à travers cette punition, c’est la fête qui a été gâchée.
Comment Zidane a-t-il pu à ce point oublier tout ce qu’il représente et sait représenter?
On s’épuise auprès des adolescents à plaider non pour le pardon des offenses, mais pour la réponse par le mépris. On leur dit que rendre un coup pour une insulte, c’est s’abaisser au niveau de l’insulteur, et que celui-ci est plus mortifié par l’indifférence de celui qu’il agresse que par une réaction qui prouve qu’il a atteint son but. On n’est pas humilié par les imbéciles. On le détaille, on le repète, on le développe ... et les gosses se foutent quand même sur la gueule pour un oui, pour un non, pour un “sale arabe (ou con, ou noir, ou juif, ou pédé)” de trop.
On aimerait pouvoir dire: “Regarde Zidane! Tu l’admires, on l’insulte et il ne répond pas. Son silence est plus fort. Regarde”.
Et Zidane, qu’on aime, qui respire la sympathie et l’humanité, Zidane se retourne, fait deux pas, et balance un violent coup de tête dans la poitrine de Materazzi.
On est sans voix.
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