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AutreMonde
26 mars 2006

Mélanges (II)

Tandis que les R.G. s’amusent ... paraît-il.

Je peine à suivre, tout va trop vite quand réfléchir prend du temps. On peut tout juste poser des questions, il n’est plus guère envisageable d’attendre des réponses. Accélération des médias et frénésie du mouvement. Où il apparaît à l’évidence que la France a inventé un vaccin très efficace contre la grippe aviaire : le C.P.E.
Plus de volatile défaillant venant agoniser sous nos fenêtres, plus de statistiques inquiètes et quotidiennes, plus d’alerte . Pffuit ... Évaporée l’influenza .... Fascinant. Où est le vrai?

Nouvel objet du principe de précaution et de jeanfoutrerie, l’ordre du jour est aux manifs étudiantes et lycéennes, aux cars de CRS le long du Boul’mich. On ne peut plus aller porter son courrier à la poste de la rue Cujas sans montrer patte blanche. La Sorbonne est en état de siège. À juger sur ce que l’on voit soi-même, l’affaire est plutôt pitoyable. Il y avait jeudi soir une trentaine d’adolescents, pas plus, qui braillaient vaguement au milieu de la chaussée rue Soufflot. Des CRS en nombre équivalent bloquaient le bas de la rue, entre le MacDo aux vitres récemment brisées remplacées par des panneaux en bois et le Quick, en face, à première vue intact. On casse du capitalisme US et on respecte la frite belge.... Bêtise des excités de tout bord.
Du balcon, l’affrontement mimé était assez ridicule et visiblement, aucun des deux groupes ne savait quelle attitude adopter. On maintenait trente à cinquante mètres de distance. Quelques voitures ont pu traverser le double barrage, et un Bus. Et puis finalement, tapant en cadence avec leurs matraques sur les boucliers pour se donner du cœur au ventre et effrayer l’ennemi, les CRS en tenue de combat ont esquissé une charge en trottant sur deux rangs de profondeur et la largeur de la rue vers le Panthéon. La jeunesse braillarde a eu le temps d’allumer quelques cartons et puis a déguerpi vers la Mairie du Cinquième. Je n’ai pas su la suite. Il faisait un peu froid , la bourgeoisie du coin est retournée à sa télé et j’ai, comme elle, refermé la fenêtre. Vendredi matin, c’est d’affrontements sur l’esplanade des Invalides que parlait la radio. Rien à en dire, je n’y étais pas. Mais ma guerre picrocholine était un peu minable.

On se demande ce que tout cela va donner. Les gazettes s’interrogent sur l’ami Nicolas: partira? partira pas? Quand à Dominique de, il a d’ores et déjà reculé. Son affaire était mal préparée et on va en sortir sans discuter du fond, je le crains. Quel fond, d’ailleurs? On ne discute sérieusement plus de rien. On a des titres. Le Monde d’hier qui annonçait -dénonçait: "Les bons diplômés trustent les concours de la fonction publique". Comme on ne sait plus que faire avec un bac ou une licence, on va piquer leur place aux CAP-BEP qui pensaient pouvoir prétendre à un poste d’ouvrier ou d’employé de catégorie C, etc. Scandaleux? L’égalité républicaine, nous dit-on, aboutit ici à une ségrégation et les jeunes français issus de l’immigration voient diminuer leurs chances d’accéder aux emplois de l’État, des hôpitaux ou des collectivités territoriales... S’agit-il vraiment là d’une ignominieuse manœuvre ? A-t-on là tout le sens du dossier? Que valent les diplômes cités ? Pourquoi s’accrocher à des réflexes d’ayant-droit : tel diplôme, donc, tel métier ? Que déterminent les procédures de recrutement de la fonction publique? Quelle est la pertinence des épreuves des concours incriminés ? Pourquoi corrèle-t-on si fortement “jeune français issu de l’immigration” et “CAP-BEP” (avec exclusion des profils “Bac - Licence”)? On retombe toujours dans la même ornière : Le système éducatif parvient-il à donner à toute bonne volonté sa chance de se former vraiment ? Et la société a-t-elle du travail à donner à tous ceux de ses membres qui veulent vraiment travailler ? Devant certaines situations et sur certains exemples - ce qui ne veut pas dire que rien n’est perfectible, bien au contraire - j’ai quand même l’impression que la réponse pourrait être, ponctuellement, deux fois oui ... et que c’est l’individu, ponctuellement, qui pousse au non! Pensée droitière ? Faut voir .........

Comme la grippe aviaire, le racisme et l’antisémitisme ont succombé au CPE ces derniers temps. On avait pourtant eu droit à de fortes poussées médiatiques, avec l’affaire Ilan Halimi et autour. Comme un flottement là aussi: on tire à côté de la cible. Ce n’est pas contre le racisme et l’antisémitisme qu’il faut lutter, c’est contre la connerie qui en est la mère, contre l’intolérance, le manque d’ouverture à la culture de l’autre, qui commence par l’absence de compréhension de sa culture propre, de ses richesses et de ses limites .... Réagir à tout cela? Lutter pour l’école! C’est là qu’est le vrai combat : instruire, éduquer, former, dans des lieux consacrés et avec des maîtres à la hauteur de cette ambition. ce qui repose tous les problèmes ... L’école est au centre de la question sociale et il est pourtant à parier qu’elle continuera à être totalement noyée dans de petites querelles aveugles jusqu’à l’explosion.

En attendant, on a surmédiatisé pendant trois jours Harry Roselmack, soudain plus foncé de peau que bon professionnel tellement l’éloge vertueux du “noir compétent” s’entêtait sur la couleur pour, de fait, la souligner dans l’affirmation de sa négation. Les thuriféraires du journaliste n’ont fait que du racisme déguisé.
Et concernant cette affaire Halimi, au delà de la barbarie intrinsèque dont il a été victime, l’antisémitisme du riche-parce-que -juif , dont les conséquences ont été en la circonstance navrantes, est-il tant que ça avéré? Chacun sait que le consumérisme homosexuel s’appuie sur l’existence de fait d’une communauté gay à la fois cultivée et aisée, qui ne crie pas que je sache à l’homophobie quand une démarche de pensée réductrice lui accole ces épithètes, prises aussi en compte dans les stratégies d’un certain marketing. Il y a beaucoup d’intellectuels juifs et les tunisiens sont réputés avoir le sens du commerce. Insultes ? C’est la bêtise ayant mésinterprété le raccourci abusif qui peut devenir scandaleuse et dangereuse, et, donc on y revient: l’ennemi, c’est la connerie et l’arme de défense, ce doit être l’école.

Et l’école, justement, dans ce but, gagnerait à faire plus large place à la presse, aux médias, aux arts, pour y analyser les manifestations de l’ouverture ou de l’étroitesse d’esprit, pour y éclairer le sens du débat qui s’y déroule ou qui s’y cache, et en toute choses, former en cherchant l’équilibre. In medio stat virtus. Car qui niera qu’il y ait des excès? Sur ce qui me tombe sous la main, là, dans un dossier en sommeil au coin du bureau, je retrouve des pages du Monde qui pourraient très utilement servir de base à de vrais échanges en classe, pratiquement dès la quatrième. Mais cela suppose un cadre de débat et probablement deux ou trois points de vue “adultes” pour aider l’avancée de la réflexion (deux ou trois profs, ensemble). Ainsi, dans lesdites pages du Monde ....

....... et juste pour cerner rapidement les thèmes :

Une correspondance de Montréal dont j’ai déjà parlé, que je voulais développer et ... que je laisserai là, en piste de réflexion. Sous le titre : “Le poignard à l’école, mais pas ostensible” et en sous-titre : “Au nom de la liberté de religion, la Cour Suprême du Canada autorise le port du kirpan pour les garçons sikhs, à condition qu’il soit caché”. Les dégats d’un communautarisme mal régulé, me semble-t-il. (Numéro du Di.5/3 - Lu.6/3)

Meurtre d’Ilan: osons nommer la bête, un point de vue de Sylvie Anne Goldberg, historienne, directrice d’étude à l’EHSS. J’ai au fond ci-dessus amorcé ma vision de la chose. (Numéro du Ve. 3/3)

Choc des civilisations? Non: des philosophies, une très intéressante contribution d’André Glucksmann sous-titrée : “Mettre sur le même plan les caricatures de Mahomet et la négation d’Auschwitz, sacré contre sacré, c’est confondre la croyance et les faits”. (Numéro du Sa. 4/3)

Des barbarismes à la barbarie, où Barbara Lefebvre, enseignante elle même, auteur avec Eve Bonnivard d’Élèves sous influence, (Audibert éditeur) développe cette idée que Nos écoles sont devenues des laboratoires de la haine de l’Autre et que La violence verbale y prépare les pires passages à l’acte . Très “porteur” par son argumentation claire pour un échange. (Numéro du Me. 8/3)

Le héros noir oublié, un passionnant article de Claude Ribbe, écrivain et membre de la Commission nationale des droits de l’homme, sur le père d’Alexandre Dumas, né esclave en Haïti en 1762, mort le 26 février 1806, qui fut Général d’Empire, qui n’a eu les honneurs d’aucun bicentenaire, quand la République avait su, en 1906, le fêter. Où l’on pourra largement, dans une histoire événementielle et héroïque propre à fixer chez les enfants le souvenir, parler d’esclavage, de bravoure, de panache, d’honnêteté (la rectitude du Général a été exceptionnelle) et ... de littérature. (Numéro du Me. 1/3).

Sans oublier, et qui m’a, comme on disait dans les années 90 (je crois que cette mauvaise habitude se perd) “interpellé”, la double page complète Nous partageons le même monde, que le journal, dans son numéro du Jeudi 9 mars, a concédée, moyennant espèces que je devine très sonnantes et trébuchantes, à la Kingdom Holding Company, pour vanter la munificente bienveillance du Prince Alwaleed Bin Talal Bin Abdulaziz Alsaud, qui octroie à l’Université d’Harvard 20 millions de dollars pour un Programme d’études islamiques et de nouveau 20 millions de dollars à l’Université de Georgetown pour le développement d’un Centre pour l’entente Islamo-Chrétienne. L’affaire m’a laissé rêveur. Que sont au juste ces “études islamiques”, quid de l’entente “Islamo-Chrétienne”, me resterait-il des arrière-goûts de croisade dans l’inconscient ou suis-je sujet à des crises d’Islamophobie ? J’aimerais être un peu mieux éclairé là-dessus et au fond, je m’étonne de n’avoir pas vu ensuite passer de réactions de lecteurs ou de note d’information complémentaire de l’équipe de rédaction. La Pub était gigantesque . Un choc. Et la révérence à “Son Altesse le Prince” ne m’est pas spontanée ... Nous partageons le même monde ? Certainement, mais il faut voir la manière. En somme, ça se discute (et ce peut-être, foin de procés d’intention, fructueux, mais, répétons le: Faut voir!). (in Numéro du Je. 9/3)

Voilà. On pourrait s’en tenir là, mais au fond du dossier, je retrouve deux autres “découpages” . Incontournables comme on va voir, mais ceux-là, pas pour les salles de classe, et qui, puisqu’ils sont là, ont dû m’amuser. Une page du week-end 5/3 - 6/3 sur les Chrétiens Gays . Diable! “Je menais une double vie, Chrétien le jour et Gay la nuit ... C’était très malsain. Beaucoup de gens, y compris des prêtres mènent cette double vie": on en apprend des choses! Et tout ça est très sérieux, avec enquête CNRS-EHESS à l’appui sur Les valeurs et pratiques religieuses des chrétiens homosexuels. Pas très commode à concilier quand même, non? Et est-ce un vrai “sujet” ? “Rien ne changera dans l’Eglise catholique tant qu’une masse critique d’homosexuels n’aura pas fait son coming out...” Dans son émission Répliques, l’autre samedi, Alain Finkielkraut évoquait la “pornographie de l’aveu”. Ma foi ... Faut-il vraiment porter sa sexualité en bandoulière?

Et puis, last but not least et cerise sur le gâteau, sous le titre “Les Robbe-Grillet s’amusent” (d’où les “R.G.” du début! ...Il fallait quand même expliquer) , le numéro du Vendredi 3 mars a offert une page et une photo à Catherine Robbe-Grillet, maîtresse de cérémonies SM (Sado-Maso) , qui précise (attention, ne pas confondre, on se titille dans le haut de gamme!): L’enjeu des cérémonies que j’organise n’est en aucun cas la baise. L’enjeu, c’est l’émoi érotique (Ben voyons ..). On a casé une deuxième photo, Alain R-G en compagnie d’Arielle Dombasle sur un tournage, précisant que le romancier et cinéaste nourrit son imaginaire des mises en scène de son épouse . Elle les lui raconte, il apprécie. Mais de loin: Nous avons des vies sexuelles séparées. Lui 83 ans, elle (encore très active! ... on tient à vous le dire!) 75: quels gaillards ! Toujours la “pornographie de l’aveu” ? Grotesque au fond! On n’a vraiment pas mieux à penser ? Zola se masturbait-il en écrivant Nana ? Voilà une thèse qui reste à écrire et qui modifierait profondément le sens et la portée du roman, non? Après Julien Gracq et sa Littérature à l’estomac, Alain Robbe-Grillet, sachant Madame à la baguette, pour une Littérature à la braguette ?

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