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AutreMonde
11 janvier 2006

Maladies Éducatives

TROIS RÉFÉRENCES ET PUIS LES COMMENTAIRES........

Dans Le Monde daté mercredi 11/ 01, l’analyse de Daniel Cohen en page 2: “ Banlieues, chômage et communautés”.
Dans Libération du même 11 / 01, le compte-rendu de la conférence de presse de Karen Montet-Toutain (affaire du LEP Louis Blériot d’Étampes) par Marie-Joëlle Gros, le billet d’Emmanuel Davidenkoff à propos d’Eric Debarbieux et l’éditorial de Gérard Dupuy (pages 2-3).
Dans Le Monde daté de jeudi 12 / 01, le compte-rendu d’Yves Bordenave, page 10, toujours sur l’affaire d’Étampes.

LES COMMENTAIRES, DONC .................

De bons “papiers”, du bon journalisme. Et après ?
Pourquoi faut-il que ce soit dans les journaux qu’on lise, sous la plume de non- professionnels de l’éducation, les analyses pertinentes qui désertent les circonlocutions en langue de bois des responsables ? Tutto va bene, qu’ils disent...

Mais d’abord Mme Montet-Toutain. Elle a raison de témoigner. Malheureusement, le petit écho médiatique que lui valent ses déplorables blessures sera vite étouffé. Il n’y a pas, en quelque sorte, assez de crimes de sang dans le système éducatif pour que les journalistes relaient longtemps les problèmes et que soient sérieusement envisagées les réformes qui s’imposent.

Ce qu’elle a vécu avant le drame et qu’elle décrit, les agressions verbales, les insultes, la pression morale et physique, l’impossibilité de fait d’enseigner, la réduction de l’ambition professorale à ceci: maintenir la fiction d’une classe majoritairement assise et d’un enseignant en position de guidage quand on ne prend l’information que depuis le couloir, en regardant par la fenêtre de la salle, tout ceci, c’est le quotidien de tous les établissements difficiles, c’est à dire d’un bon tiers des établissements, et, avec des nuances dans l’insulte et dans le risque d’agression, mais pas dans l’inattention et l’inefficacité pédagogique, cela gagne progressivement l’ensemble du système éducatif.

DEUX PROBLÈMES DE FOND ..........

1. L’éducation nationale est malade de ses cadres.
2. Les notions intriquées d’équipe éducative et d’autonomie des établissements sont des baudruches pour discours ministériels totalement vides de sens.

MAIS ENCORE ? ...

LES CADRES ........

Du chef d’établissement au recteur (ne parlons pas du ministre!), et les désignations sont génériques, comme si la fonction créait ipso facto le blocage conceptuel (ce sera moins agressif que:l’incompétence), l’absence de compréhension des difficultés “du terrain” est dramatique.

Au sein de la pyramide hiérarchique de notre système jacobin, il n’y a pas de “partenaires”. Tout rouage perçoit la fraction dont il est le barreau d’échelle supérieur comme composée d’imbéciles inaptes et de fainéants en même temps qu’il tremble à l’idée de mécontenter en les distrayant de leurs importantes préoccupations par ses soucis professionnels ceux qui le notent. Car à l’éducation, du bas de l’échelle au sommet, de l’école élémentaire à la retraite, on note et on est noté!

Partant, le professeur se cache de ses collègues et vend des salades à son chef d’établissement et à ses inspecteurs. Le chef d’établissement , souvent terré dans son bureau, se félicite chaque jour de ne plus être en classe, transforme en paperasse lénifiante les quelques protestations écrites qui lui sont remises (la bouillie synthétique à transmettre à l’inspection académique est sa spécialité), et n’entend pas les protestations orales. L’inspecteur d’académie qui commence à être un peu loin de tout ça prend ses chefs d’établissement pour des incapables (et en privé pour des cons), et touille en une ou deux pages appuyées sur des statistiques encourageantes un rapport insipide (au sens propre) à son recteur (ah!, la vertu des pourcentages! Quelques profs bousculés ou giflés, quand ça se lit “0,9 % du corps enseignant concerné par des incidents sérieux”, ça remet quand même les choses en place et on n’a vraiment pas besoin de transmettre la photo du prof avec un œil au beurre noir et un bras en écharpe).
Et le recteur? Ou bien il est dupe ou bien, s’il a un brin de lucidité, il croise les doigts en se carrant dans un fauteuil finalement plus confortable que sa paillasse de l’université..... en attendant de se faire virer si, on n’a pas toujours de la chance, un pépin sérieux impose au ministre de faire sauter un fusible. Raison de plus pour profiter du sursis sans trop gratter ni mécontenter quiconque.

Alors ............ L’éducation nationale a besoin de managers, de managers bien formés, audacieux, sensibles aux problèmes de la relation pédagogique, sachant ce que dialoguer avec une classe veut dire, mais de managers, de meneurs d’homme, se faisant “une certaine idée du système éducatif” comme un autre “de la France” , prêts à prendre des initiatives et des risques et soucieux de s’attaquer aux problèmes en animant des équipes et en élargissant au maximum les marges de manœuvre qu’on leur consent.... Pourquoi riez-vous? Ah!, vous êtes de la maison et vous connaissez le personnel ? Évidemment ....

Il y a des exceptions? Bien sûr, il y a toujours des exceptions, mais c’est bien parce qu’elles se remarquent comme telles que tout va à vau-l’eau... parce qu’il y a, surtout, les autres, ceux justement qui ne sont pas exceptionnels, qui rentrent dans une norme grise et qui rasent les murs dans le cheminement décrit!

Une réponse? Oui, politique, en modifiant entièrement le recrutement (le choix) et la formation des cadres, et en fait, en remettant le système à plat.

IDEM POUR ÉQUIPES ÉDUCATIVES ET AUTONOMIE .............

Tout reste à faire, la stabilité des professeurs, le management des chefs d’établissement, la prise de conscience du groupe et de ses responsabilités collectives, la prise de conscience de ce qu’il faut mettre en commun les idées, les soucis, les compétences, les forces, dans une gestion d’ensemble d’un temps de service “collectif” (le potentiel de l’établissement) à totalement redéfinir, redistribuer, l’émergence du sens de l’intérêt général et sa revalorisation, la volonté de prendre en charge non pas “ses” cours, mais, avec les autres, toute la population scolaire locale, pour en analyser les spécificités, en décider l’adaptabilité aux programmes prévus et quand nécessaire, décider de l’adaptabilité desdits programmes à ladite population .............. Et ça s’appelle, en passant, l’autonomie.

Sortir toute la structure de son infantilisation: “On m’a dit que, je n’ai pas le droit de, il n’est pas prévu que, ce n’est pas dans le programme, mais c’est dans le programme, ça ne se fait pas, etc. “

Il faudrait redonner à chaque acteur du système éducatif le sentiment que l’éducation nationale, c’est lui, pourvu qu’il y travaille avec les autres, dans une vraie solidarité positive... qui n’a rien à voir avec la caricature syndicale, dans “son” établissement, dans “son” équipe!

Ouais...... Il faudra en reparler.

En attendant, merci à Karen Montet-Toutain d’avoir dit son désarroi, et que personne ne l’écoutait. Merci à Marie-Joëlle Gros et à Yves Bordenave pour leurs comptes-rendus. Merci à Daniel Cohen d’avoir su souligner dans son paragraphe “Modèle républicain français” que beaucoup se jouait à l’école et aussi la pseudo-crise des banlieues. Merci à Emmanuel Davidenkoff d’avoir interrogé Eric Debarbieux et merci à celui-ci d’avoir un regard et un discours justes sur le problème de la violence (mais qui l’écoute?) . Merci à Gérard Dupuy pour un éditorial (“Pugnacité”) qui souligne ce qui, dans cette affaire d’Étampes, doit l’être.

Merci. Et après ?

Après ? Après, rien, je prends les paris.
Le scandale éducatif n’est qu’un “marronnier”. Il refleurira au prochain premier sang, on constatera que tout est à l’identique et puis...... On se demandera comme aujourd’hui, mutatis mutandis, si c’est bien sûr que Cécilia s’est remise avec Nicolas.
Voyez-vous ça, quand même!
Vous l’auriez reprise, vous ?

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